Les réseaux de chaleur, chauffages central à l’échelle d’un quartier ou d’une ville, sont encore peu développés en France, avec seulement 5 % des bâtiments desservis en France. Mais à Paris, un quart des habitants sont chauffés par le réseau de chaleur de la CPCU. Ce réseau est le plus grand réseau français et l’un des plus grands réseaux européens.
La CompagnieParisienne de Chauffage Urbain (CPCU) gère le réseau de chaleur de Paris et de communes proches depuis 1927. 8 sites de production d’énergie dont 2 cogénérations, permettent de chauffer 460 000 équivalents logements grâce à la distribution de 4,7 TWh de chaleur. Via la cogénération, le CPCU produit également 1 TWh d’électricité.
Le mix énergétique est composé de 22 % de charbon, 28 % de gaz et de cogénération, 39 % d’énergies de récupération essentiellement produite par trois usines d’incinération du SICTOM et 11 % de fioul TTBS. « Notre ambition est d’avoir un mix énergétique diversifié et surtout flexible qui réponde à la demande réelle », explique Henry Valibus, Directeur de l’Ingénierie et du Développement de CPCU. « Le réseau de chaleur est le seul moyen de valoriser les grosses productions, comme la chaleur fatale issue des usines d’incinération ou de la géothermie profonde », rappelle quant à lui Jean-Louis Bal, Président du Syndicat des Energies Renouvelables.
Favoriser le recours aux énergies renouvelables
Les objectifs pour 2015 sont de dépasser les 50 % d’énergie renouvelable et de récupération dans la chaleur livrée, réduire les émissions de gaz à effet de serre de 15 % et faire passer la part du fioul de 10 % à 2 %. Cela se fera notamment grâce à l’ajout de la biomasse et de la géothermie dans le mix énergétique. Car le réseau de chaleur est un moyen efficace pour valoriser biomasse : le rendement énergétique d’une chaudière collective de grande capacité est supérieure aux petites chaudières et permet de mieux contrôler les émissions polluantes, grâce aux systèmes de traitement des fumées. Pour diminuer l’usage du fioul et le remplacer par du gaz naturel et du biodiesel, CPCU est en train de rénover 5 de ses centrales de production.
La CPCU vise à développe les énergies renouvelables pour réduire la corrélation du prix de la chaleur à celui des énergies fossiles. De plus, elles permettent de réduire le nombre de camions en ville pour l’approvisionnement des centrales, réduisent les des émissions de CO2 et améliorent la qualité de l’air en réduisant les polluants locaux : NOX, SOX et poussières.
De nombreux projets en cours
Pour permettre ce développement, plusieurs projets sont à l’étude : sur le court-terme, la co-combustion bois/charbon dans la centrale de Saint Ouen vise à diviser par deux l’usage du charbon d’ici 2015, en le remplaçant par des granulés de bois. La récupération de la chaleur sur la Seine permettra aussi de chauffer en partie l’éco-quartier des Docks de Saint-Ouen. Sur le court-terme, le projet de géothermie de Paris-nord-est, creusé à 6 km de profondeur, permettra de produire de la chaleur et du froid. Cette installation aura une puissance de 14 MW en chaleur et 5 MW en froid.
Sur Ivry, un autre projet de géothermie est à l’étude. Sur le secteur de Paris Batignolles aménagement, une géothermie creusée à 800 m complétera la boucle d’eau chaude d’actuelle. Sur la centrale de Vaugirard, des essais sont menés pour remplacer les fiouls lourds par des biocombustibles, comme le biométhane issu de la méthanisation des ordures ménagères ou des boues de stations d’épuration. « Le projet qui contribue le plus aux objectifs de 2015 est le projet de co-combustion à Saint-Ouen, avec une part de 8 à 10% dans le mix énergétique », note Henry Valibus. Le montant des investissements pour l’ensemble de ces projets s’établit à environ 200 millions d’ici 2015.
Des émissions de gaz à effet de serre en baisse
Les émissions de gaz à effet de serre du réseau de chaleur de la CPCU diminuent rapidement. Si elles étaient de 354 gCO2/kWh en 2011, elles n’étaient déjà plus que de 206 gCO2/kWh en 2012. Les objectifs sont d’atteindre 175 gCO2/kWh en 2015.
Au niveau national, les réseaux de chaleur émettent 189 gCO2/kWh. En comparaison, selon l’arrêté relatif au diagnostic de performance énergétique, le chauffage électrique émet 180 gCO2/kWh, le gaz naturel 234 gCO2/kWh, le fioul domestique 300 gCO2/kWh et le charbon 384 gCO2/kWh. De son côté, la biomasse n’émet que 13 gCO2/kWh.
Comment fonctionne le réseau parisien ?
Le réseau s’étend sur 470 km de réseau maillé. Pour diminuer les pertes de chaleur, le fluide caloporteur utilisé est de la vapeur d’eau à 20 bars, distribué par 16 boucles d’eau chaude. La mutualisation de ces boucles permet de lisser les pics de consommation entre les bâtiments Sur chaque boucle, une sous-station d’échange récupère l’énergie de la vapeur pour la transmettre dans le réseau secondaire alimentant les bâtiments du quartier. Le réseau principal distribue la vapeur à ces boucles et un réseau plus petit en récupère la vapeur condensée.
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du magazine Natura Sciences