Aucune décision majeure ne ressort pour l’instant de la COP27 de Charm el-Cheikh en Égypte. La question de la solidarité climatique, à savoir l’aide financière accordée par les pays occidentaux aux moins riches reste au cœur des débats. Les ONG attendent beaucoup plus et dénoncent la présence de lobbies.
Il reste « beaucoup de travail » pour surmonter les divisions entre pays riches responsables du réchauffement et pays pauvres qui réclament de l’aide pour y faire face, a prévenu lundi Sameh Choukri, président de la COP27, alors que s’engageait la deuxième semaine de négociations à la conférence de l’ONU. Devant les dirigeants réunis en ouverture de la COP27, le chef de l’ONU Antonio Guterres a pourtant été clair : « L’humanité a le choix : coopérer ou périr. Il s’agit soit d’un pacte de solidarité climatique, soit d’un pacte de suicide collectif ». Mais après une semaine d’une COP27 qui devrait se clôturer ce vendredi 18 novembre (hors prolongations), les négociations ont peu avancé. Plusieurs ONG sur place nous livrent leur ressenti.
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Une COP27 submergée par les lobbiess
Parmi les points négatifs de cette COP27, les ONG présentes dans le complexe de Charm el-Cheikh sont unanimes : les lobbies polluent les débats. « On se fait plus entendre, mais malheureusement les lobbies des énergies fossiles aussi se font beaucoup plus entendre, regrette Fanny Petitbon, responsable plaidoyer de l’ONG Care France. « Malheureusement on voit qu’il y a encore beaucoup trop d’événements sur le gaz ‘propre’ : à l’image des Émirats Arabes Unis qui disent que leur gaz et leur pétrole sont les plus ‘clean »’, ajoute-t-elle.
« Il y a une véritable marée noire de lobbyistes des industries fossiles. Ils sont plus nombreux que les délégations nationales des 10 pays les plus impactés par le réchauffement climatique », explique Clément Sénéchal, chargé de campagne climat chez Greenpeace France. La présence notamment de Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies, à la COP27 a révulsé les ONG. Un constat partagé par Aurore Mathieu, du Réseau Action Climat : « Cette semaine on a observé beaucoup de fausses solutions prônées par les lobbies. Nous pouvons parler de greenwashing ».
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Des négociations lentes
Cette COP27 se présente comme une « COP de mise en œuvre ». Du côté des ONG, cela reste à prouver. « Aucun pays développé n’a amené quoi que ce soit de nouveau et de significatif à la table des négociations, notamment sur les mesures à mettre en œuvre pour baisser rapidement les émissions de CO2″, explique Clément Sénéchal. « Nous ce qu’on voit, c’est peu d’avancées concrètes. Si on regarde du côté de l’atténuation, au cœur de l’objectif des 1,5° C, seul le Mexique a soumis une nouvelle NDC [contribution déterminées au niveau national, soit un engagement national de réduction de ses émissions, NDLR]. La Turquie devrait soumettre la sienne cette semaine, mais c’est tout. On a quitté Glasgow avec de l’espoir. Mais jusqu’à maintenant, il y a très peu d’annonces marquantes », déplore Aurore Mathieu.
« Très peu d’annonces en effet que ça soit en termes de réduction des émissions ou de nouveaux financements pour aider les pays du Sud à faire face aux impacts, témoigne Fanny Petitbon. Cette COP27 ne répond pas du tout à l’urgence climatique. » Elle poursuit : « On est arrivé à la fin de la première semaine avec des textes encore à l’état de brouillon, alors même qu’en fin de première semaine, normalement, les négociateurs doivent rendre leurs copies pour que les ministres ensuite puissent régler les sujets brûlants en deuxième semaine. On perd donc du temps. Beaucoup de déception sur la partie financement également. Les quelques annonces parlent de quelques millions de dollars alors qu’on devrait parler en milliards. »
Une lueur d’espoir
Cette première semaine laisse un goût amer aux ONG mais quelques éléments subsistent pour maintenir l’espoir d’une deuxième semaine plus concluante. « Pour la première fois, une négociation formelle est ouverte sur le financement des pertes et dommages. Il s’agit de mobiliser les pays riches sur les réparations des dégâts matériels et des tragédies humaines induites de manière irréversible par le réchauffement climatique », explique Clément Sénéchal. Il ajoute : « plusieurs ‘pays’, dont l’Inde, poussent pour « éliminer progressivement « tous les combustibles fossiles ».
« C’est le moment de faire monter la pression quoi qu’il arrive, rappelle Fanny Petitbon. Si les pays ne respectent pas leurs engagements, ils compromettent l’avenir de la planète. » Elle complète : « On a de l’espoir. Les avancées sont lentes mais possibles. Certaines questions, comme celle des pertes et dommages, étaient totalement ignorées il y a 30 ans par les pays riches, alors qu’aujourd’hui cela est devenu un sujet très politique ».
Avant la fin des négociations, les ONG espèrent que les textes répondent à la vulnérabilité des pays du Sud.
Une société civile encadrée
Comme chaque année, durant la journée du samedi entre les deux semaines des COP, la société civile organise une grande mobilisation. Cette année en Égypte, seules les personnes accréditées pour participer à la COP auront pu prendre part à la marche. Une marche, qui plus est, très encadrée sur le site de la COP. Dès le départ, les autorités égyptiennes avaient prévenu qu’elles n’autoriseraient aucune manifestation dans les rues de Charm el-Cheikh. « Nous savions que cette COP serait encadrée », admet Anastasia Léauté, présidente du Réseau Étudiant pour une Société Écologique et Solidaire (RESES). Malgré tout, elle précise : « Presque tous les jours, on a vu des rassemblements dans les couloirs de la COP. Nous avons eu des journées thématiques avec des rassemblements, comme le Gender Day, ou le Global Action Days. Mais ces sujets ont malheureusement été relayés au second plan de manière générale ».
Pour Anastasia Léauté, le rôle des ONG et de la jeunesse est primordial dans la lutte contre le dérèglement climatique. « Chez RESES, cette semaine nous étions notamment concentrés sur le Action for Climate Empowerment (ACE) », dit-elle. L’objectif primordial de l’ACE est de donner à tous les membres de la société les moyens, notamment les jeunes, de s’engager dans l’action climatique. « Ce qu’on espère c’est que la jeunesse de soit par marginalisée dans cette COP27″, explique Anastasia Léauté.