Le think tank Penser L’après lance Mission Élysée, « le programme pour faire entendre la voix des jeunes dans la course aux présidentielles« . Natura Sciences s’est infiltré à la session de Kick-off du samedi 6 novembre.

Alors que l’élection présidentielle approche à grands pas, la jeunesse militante se prépare à s’en emparer. Au fond d’un bâtiment du Centre de recherches interdisciplinaires (CRI), la militante Stacy Algrain et son équipe du think tank Penser L’après lançaient le samedi 6 novembre son programme Mission Élysée. Sur la soixantaine de jeunes inscrits, une quarantaine a pu faire le déplacement dans le 14e arrondissement parisien.
Mission Élysée veut être un lieu de formation et de débat pour aider les jeunes à se réapproprier les enjeux politiques. Quatre après-midi de formation sont prévus d’ici le 22 janvier. Au programme : les enjeux liés à la politique sociale, à l’écologie, au féminisme et à l’égalité des genres, ainsi qu’à l’économie. Un hackathon, ouvert à toutes et tous, conclura la première phase du programme. « Le hackathon permettra de définir ce que la jeunesse attend de la présidentielle, ce que l’on fait ensemble, explique Stacy Algrain. Pour ceux qui le souhaitent, nous poursuivrons avec une mobilisation jusqu’en avril. Nous pourrons par exemple nous mobiliser contre l’abstention chez les jeunes.«
Une Mission Élysée pour porter la voix des jeunes
« Nous souhaitons réintroduire les jeunes dans le débat politique, les aider à se construire une opinion politique, partage Elise Zarrouk, membre de l’équipe de Penser L’après. Ici, c’est un lieu pour échanger, décomplexifier la politique et s’engager politiquement, sans carte ni parti.«
Ce programme veut être une réponse aux attentes de la jeunesse qui se sent délaissée par le monde politique. « Les politiques ont presque tous plus de 50 ans et les jeunes ont l’impression que les politiques délaissent des problématiques qui les touchent particulièrement« , avance Damien Turlay, également membre de l’équipe de Penser L’après. « Par exemple, sur le climat, le social, le féminisme et le changement de modèle économique, la réponse politique n’est pas à la hauteur« , complète Elise Zarrouk.
Damien Turlay explique que le programme vise aussi à construire des demandes de la jeunesse. « L’idée est de pouvoir dire que des jeunes éloignés de la politique traditionnelle ont construit ces revendications et de demander aux candidats et candidates leurs engagements sur ces sujets. »
Comme une envie d’engagement
Qu’est-ce qui a poussé ces jeunes à s’engager dans ce parcours? Gaëlle, 23 ans, et engagée par ailleurs dans la Primaire Populaire témoigne. « Je me suis inscrite par curiosité, car le programme est apartisan mais défend des idées proches des miennes, notamment le féminisme et la solidarité. C’est l’occasion de rencontrer d’autres personnes, hors des cercles militants.«
Cette envie de rencontre et d’échanger, ils et elles sont beaucoup à la mentionner. Adèle, également 23 ans, apprécie la diversité des intervenants. Elle en est convaincue, le programme consolidera ses armes en vue des débats qu’elle compte avoir à l’occasion de la présidentielle. « C’est surtout l’envie d’apprendre, qui m’a motivée à participer au programme« , confie-t-elle.
Du haut de ses 17 ans, Ambroise est le cadet du programme. En classe de terminale, il votera pour la première fois de sa vie à la présidentielle 2022. « J’ai l’impression d’avoir un regard naïf sur la politique. Je suis à la recherche d’informations pour construire mon opinion et comprendre les enjeux« , partage-t-il d’une voix assurée.
Un kick-off pour lancer le débat
Et les participants sont gâtés. Pour ce lancement, trois ateliers et conférences sont au programme de l’après-midi. Le premier temps, mené par l’association Trouve Ta voix les forme à la prise de parole en public. Puis, Wallerand Moullé-Berteaux et Antonin Marin du média Youtube Le Crayon viennent leur parler de l’art du débat. « L’art du débat, c’est comprendre que je n’ai pas la vérité mais que j’ai mon propre avis construit en fonction de mes valeurs« , propose Wallerand Moullé-Berteaux.
Après un échange interrogeant l’importance du débat et de la mise en avant dans les médias des arguments contradictoires, les deux journalistes invitent les jeunes à « aller en profondeur des sujets pour apprendre des choses au-delà des biais idéologiques et éducationnels« . Ils leur conseillent de « ne pas chercher à avoir raison, mais plutôt à comprendre les arguments de l’autre« , « garder son ouverture d’esprit et prendre du plaisir intellectuel à échanger« . Et enfin à « toujours se remettre en question dans sa vie et ses idées« .
Mission Élysée s’engage contre les fake news
Le dernier temps de la journée donne la parole à Sylvain Louvet, prix Albert Londres 2020 et fondateur de l’association Fake Off qui vise à lutter contre la désinformation, notamment dans les quartiers. Le sujet du jour : la lutte contre les fake news dans le débat public. Le journaliste met notamment en garde les jeunes participants contre la boucle de renforcement. « Une information vraie est une information qui est partagée aujourd’hui, explicite Sylvain Louvet. Le problème est que les jeunes des quartiers n’arrivent plus à faire la différence entre les faits et les opinions. » Ainsi, il insiste sur l’importance de toujours écouter les arguments de ses opposants et de demander leurs sources pour faire du « fact checking« .
À la fin de la journée, Gaëlle fait son bilan. « Le mot de la journée, c’est inspirant« , résume-t-elle. Et toute l’assemblée acquiesce. Stacy Algrain leur donne rendez-vous le 20 novembre pour une nouvelle session de formation. Une fois les affaires rangées et les sacs refermés, la joyeuse troupe quitte la salle. Quelques-uns s’en vont rapidement pendant que d’autres attendent. « On va boire un verre? », leur propose Stacy Algrain.
Matthieu Combe