Alors que les scientifiques font état d’une contamination généralisée des écosystèmes et des corps humains au plastique, 95 pays, dont la France, ont joint leur voix pour « l’appel de Nice ». Une proposition d’un traité contraignant pour « mettre fin à la pollution plastique », et ainsi peser sur les négociations internationales sur le sujet qui auront lieu en août à Genève.

Est-il possible d’inverser la courbe ? La production de plastique a doublé depuis l’an 2000, atteignant 435 millions de tonnes en 2020. Et ce n’est peut-être qu’un début. Elle devrait encore augmenter de 70 % d’ici 2040 pour atteindre 736 millions de tonnes si rien n’est fait selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ce matériau si pratique pollue presque tous les écosystèmes, sur terre et bien sûr dans les mers.
Au sommet de l’Océan de l’ONU qui a lieu du 9 au 13 juin à Nice, 95 pays, dont la France, ont signé l’Appel de Nice pour obtenir un « traité ambitieux » afin d’en finir avec la pollution plastique. “Nous n’abandonnerons pas. Nous devons réduire notre consommation et notre production de plastique”, a déclaré la ministre française de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher lors d’une conférence de presse.
Peser sur les négociations internationales
Le timing n’a rien d’un hasard, puisqu’en août prochain, de l’autre côté des Alpes se tiendront à Genève des négociations pour la conception d’un traité mondial sur le plastique. L’objectif est d’arriver à un accord contraignant, même si les pays pétroliers bloquent depuis des années l’émergence d’un tel texte. L’année dernière, les négociations organisées à Busan, en Corée du Sud, avaient échoué.
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Les États-Unis et la Chine sont les grands absents de cet appel, mais la France et les autres pays signataires espèrent pouvoir créer un momentum pour mettre la pression et obtenir un « accord historique ». Les mesures proposées sont en effet ambitieuses, la principale étant la fixation d’un objectif mondial de réduction de l’utilisation de plastique. Les États signataires devraient aussi publier les chiffres de production, d’importation et d’exportation des polymères plastiques primaires pour évaluer leurs efforts.
Diminuer le nombre de substances autorisées pour garder le contrôle
En complément, l’appel de Nice veut « mettre en place une obligation juridiquement contraignante pour éliminer progressivement les produits plastiques les plus problématiques et les substances chimiques préoccupantes ». Pour cela, il faudrait une liste des substances dangereuses pour l’environnement, ce qui représente un travail scientifique titanesque. « Plus de 16 000 produits chimiques présents dans les plastiques ont été identifiés mais nous n’en connaissons même pas la moitié ni leur toxicité pour la faune marine », explique dans le Télégramme Ika Paul-Pont, directrice de recherche au CNRS et spécialiste des pollutions plastiques.
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En clair, c’est une sorte de traité de non-prolifération des substances chimiques que veulent déployer les États signataires, alors que les chercheurs font état d’une contamination généralisée. Une récente analyse menée par le CNRS et l’Inrae mentionne qu’en France, chaque hectare de terre contient 244 kilogrammes de plastique. En grande majorité sous forme de microparticules qui s’infiltrent dans les écosystèmes, et à terme, dans les corps humains.
Des propositions saluées par les ONG
Fait rare lors de négociations internationales, les associations de protection de l’environnement ont salué les propositions de l’appel de Nice. « C’est une déclaration très importante, a salué sur TV5 Monde Muriel Papin, déléguée générale de l’association No plastic in my sea. Parce qu’on a besoin d’un signal des États et on a besoin que le traité négocié inclut absolument la réduction de production des plastiques. » Les associations, les États et les lobbys ont maintenant rendez-vous du 5 au 14 août à Genève pour des négociations, et un éventuel traité mondial.