L’Observatoire des multinationales, en partenariat avec Attac France, publie l’édition 2020 de « CAC40 : le véritable bilan annuel ». Le rapport passe au crible leurs impacts sur l’environnement, ainsi que leur politique sociale. Décryptage.
Dans l’édition 2020 du rapport « CAC40 : le véritable bilan annuel », l’Observatoire des multinationales estime les émissions directes et indirectes de l’ensemble des groupes du CAC40 à environ 1,6 milliard de tonnes de CO2 dans l’atmosphère en 2019. Cela représente environ 5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. En tête des plus gros émetteurs déclarés, se trouvent Total (30 % des émissions du CAC40), ArcelorMittal (12,2 %), Engie (11,4 %), Michelin (8,9 %), Crédit agricole (8,7 %), PSA (8,9 %) et Renault (6 %). Si l’on exclut Engie, les émissions déclarées du CAC40 sont en hausse de 2,6 % depuis 2017.
Davantage de pollution, malgré des données lacunaires
Ce classement ne doit toutefois pas être pris pour argent comptant. En effet, l’Observatoire note qu’excepté le Crédit agricole, les banques ne prennent que partiellement en compte les émissions liées aux projets et aux firmes financés. « D’autres gros émetteurs potentiels, comme Carrefour, ne publient pas de données complètes sur les émissions dans leur chaîne d’approvisionnement », ajoutent les auteurs.
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Le rapport livre aussi des données liées aux consommations d’eau et aux déchets produits par les activités. Ces données sont là encore lacunaires et loin d’être standardisées, sans prise en compte des consommations indirectes. Selon les données partielles disponibles, 36 groupes déclarent la production de 707 millions de tonnes de déchets en 2019, en hausse de 12 % entre 2017 et 2019. Carrefour génère 98 % de ces déchets. 33 groupes annoncent la consommation de 750 millions de mètres cubes d’eau en 2019, en baisse de 2 % entre 2017 et 2019. C’est l’équivalent de 300 000 piscines olympiques. L’Oréal en consomme 16 %, Total 15 %, Air Liquide 13 %, Engie 12 % et Danone 10 %.
Création d’emplois ou dividendes, il faut choisir !
Par ailleurs, l’Observatoire des multinationales estime les effectifs du CAC40 dans le monde à 4,8 millions de salariés. Ce niveau est stable par rapport à 2018. Certaines entreprises connaissent de fortes hausses d’effectifs, souvent dues à des fusions plutôt qu’à de vraies créations d’emploi. Mais d’autres sont clairement engagées dans une stratégie de réduction des effectifs. C’est par exemple le cas de Carrefour, de la Société générale et de Sanofi. Ces trois groupes perdent respectivement 15 %, 12 % et près de 6 % de leurs effectifs.
Si l’effectif augmente au niveau mondial et que le chiffre d’affaires réalisé en France augmente de 28 % entre 2000 et 2020, les emplois diminuent en France. « En 20 ans, les dividendes des entreprises du CAC40 ont augmenté de 265%, presque quatre fois plus vite que leur chiffre d’affaires et dix fois plus vite que leur effectif mondial, dénonce l’Observatoire des multinationales. Leur effectif en France a baissé dans le même temps de 12 %. »
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Ainsi, le rapport dénonce le soutien massif, sans aucune conditionnalité stricte, aux grandes entreprises. Malgré la justification de la « souveraineté économique » et du soutien à la « relocalisation » d’une partie de ces aides, le rapport confirme la financiarisation croissante de la gestion des grandes entreprises françaises. Cela se fait aux dépens de l’emploi et de leur responsabilité fiscale. C’est pourquoi, malgré les aides publiques obtenues dans le cadre de la crise sanitaire, les grands groupes français ont pour la plupart refusé de remettre en cause leur politique de dividendes. Tout comme de s’engager sur l’emploi ou sur la réduction de leurs émissions.
Auteur : Matthieu Combe, journaliste de Natura Sciences