Le Centre pour l’analyse des crimes climatiques a dévoilé une nouvelle enquête sur les activités du groupe Casino en Amazonie. Onze ONG accusent la société de vendre des produits liés à la déforestation illégale sur ces terres. De nouveaux éléments démontrent une atteinte aux droits des peuples autochtones.
Le Centre pour l’analyse des crimes climatiques (CCCA) a apporté de nouveaux éléments prouvant le rôle de Casino dans la déforestation en Amazonie. L’organisation a rendu public, ce mercredi 1er juin, une nouvelle enquête de terrain sur les terres brésiliennes. La veille, des représentantes du peuple autochtone Uru-Eu-Wau-Wau se sont rendues à Paris pour présenter le rapport.
En mars 2021, onze ONG environnementales ont assigné, en France, le groupe Casino en justice. Elles l’accusent de vendre des produits à base de viande bovine en Amérique du sud. Celle-ci étant issue de fermes liées à la déforestation illégale en Amazonie. Sur ce même territoire, le groupe réalise 47% de son chiffre d’affaires, selon les ONG représentantes de la coalition contre la déforestation . Ces dernières ont déclaré se fonder sur la loi sur le devoir de vigilance, qui oblige les grandes entreprises françaises à élaborer des mesures adaptées face aux atteintes aux droits humains.
Un site dédié à cette enquête, NourriUnMondeDeforeste.org résume l’affaire depuis ses débuts. « Nous dénonçons le groupe Casino pour son double jeu et nous lui demandons d’arrêter de participer à la déforestation », a indiqué l’ONG Envol Vert dans une vidéo Youtube publiée sur ce site.
Des violences à l’égard des peuples autochtones
Le rapport du CCCA met en lumière une « déforestation illégale opérée dans un territoire autochtone protégé de l’Etat du Rondônia au profit de l’élevage bovin », comme le souligne un communiqué des ONG membres de la coalition contre la déforestation. Désormais, de nouveaux éléments à charge se dressent contre le groupe Casino pour « manquement à son devoir de vigilance ». « La situation étudiée sur la terre indigène Uru-Eu-Wau-Wau illustre non seulement la gravité de ces risques, mais démontre également l’inadéquation des systèmes, quels qu’ils soient, adoptés par les entreprises qui font le commerce du bétail de la région, y compris les filiales du groupe Casino », conclut le rapport.
Le document fait ainsi état de 20.000 hectares « illégalement déboisés », dont 13.000 cédés aux pâturages. Une pratique également contraire aux droits humains puisque ces hectares feraient partie des terres indigènes les plus menacées d’Amazonie. Au total, cela représenterait une perte de plus de 128 millions d’euros de dégâts environnementaux. Et ceux-ci impactent directement « les peuples indigènes et la communauté dans son ensemble », détaille notamment le rapport de la CCCA.
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S’ajoute par ailleurs à cela les « menaces constantes et croissantes » subies par les peuples autochtones sur leur mode de vie. « Les peuples des terres autochtones Uru-Eu-Wau-Wau ont souffert d’un encerclement de leur territoire, constant et en expansion, qui menace leurs vie, a indiqué un membre du peuple autochtone. Selon ce témoignage, les menaces seraient ainsi nombreuses. « Tous les villages sont concernés. Ils disent qu’ils vont en finir avec les autochtones.[…] Il est risqué de marcher seul et de se faire capturer. C’est dangereux d’aller en ville« , a-t-il ajouté.
340 hectares de déforestation illégale
Des documents officiels de transport d’animaux permettent d’identifier trois fermes, localisées dans le territoire autochtone Uru-Eu-Wau-Wau, comme connectées à la chaîne d’approvisionnement d’un abattoir de l’entreprise brésilienne JBS. Cette dernière fournirait, selon le rapport, les magasins du groupe Casino au Brésil. Ces fermes seraient responsables de 340 hectares de déforestation illégale. « Avec seulement 10% des bovins produits dans le territoire autochtone faisant état de documents officiels de transport d’animaux, la responsabilité des entreprises pourrait être encore plus importante », résume le communiqué.
« Ces nouveaux éléments montrent que le groupe Casino pourrait également être responsable de ces dommages environnementaux en droit brésilien, par consentement ou omission.” , a réagit Rhavena Terto Madeira, directrice du CCCA Brésil.
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L’action en justice, initiée à Saint-Etienne, a été transmise au Tribunal judiciaire de Paris. L’institution a été désignée fin 2021 comme compétente pour juger des contentieux fondés sur la loi sur le devoir de vigilance. L’audience pour fixer le calendrier de la procédure aura lieu le 9 juin 2022. En attendant, des actions portées par d’autres délégations autochtones sont en préparation.