Les écologistes s’opposent de plus en plus aux piscines privées pour lutter contre la sécheresse. Mais comment le monde des piscines privées s’adapte-t-il à la crise climatique ? Peut-on remplir sa piscine lorsque la sécheresse sévit dans sa région ? Réponses.

L’été 2022 a été marqué par les incendies, la sécheresse et les vagues de chaleur. Ces phénomènes de plus en plus nombreux rendent cette période de l’année éprouvante. Et parmi les pistes pour lutter contre la sécheresse, s’opposer aux piscines privées n’est plus exclu. De son côté, La Fédération des Professionnels de la Piscine se défend de participer au cercle vicieux du loisir qui nuit à l’environnement. Joëlle Pulinx Challet, secrétaire générale de la Fédération des Professionnels de la Piscine et du spa, détaille à Natura Sciences les actions menées pour y faire face.
150 à 200 kg de CO2 par an
Pour défendre les piscines privées, Joëlle Pulinx Challet utilise des chiffres. « Les piscines privées représentent 0,1% de l’utilisation de l’eau au niveau national », explique-t-elle. « Il faut dire, à ceux qui n’ont pas de piscine notamment, qu’on ne remplit pas sa piscine chaque année. L’eau est conservée et traitée », ajoute-t-elle. En plus, selon la secrétaire générale de la Fédération des Professionnels de la Piscine, la taille des piscines n’a fait que diminuer dans un souci écologique. « Dans les années 70, les piscines faisaient 73 m3 d’eau, aujourd’hui nous sommes à 43 m3. Il y a donc du progrès », dit-elle.
« Il ne faut pas stigmatiser une pratique. De quel droit peut-on interdire les piscines ? Nous consommons 15 m3 d’eau par an. C’est équivalent à l’eau nécessaire pour fabriquer deux paires de chaussures ou bien produire 1 kg de viande de bœuf. Allons-nous également interdire la viande, les chaussures ou même arroser ses plantes ? », questionne-t-elle. Des chiffres nuancés par le Centre d’information sur l’eau (Cieau) pour qui une piscine représente plutôt entre 50 et 80 m3.
L’impact carbone par an d’une piscine serait de 150 kg de CO2 et de 200 kg lorsqu’elle est chauffée. « Nous calculons notre impact depuis 2006. Nous avons une commission environnement et nous sommes à l’initiative d’une norme européenne qui est en train d’être élaborée sur l’impact des piscines familiales pour que nous puissions encore mieux agir à l’horizon 2030 », affirme Joëlle Pulinx Challet.
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Une question d’utilisation « récréative de l’eau »
Dans un premier temps, il s’agit de respecter la loi et notamment de respecter les différents niveaux d’alerte sécheresse. La loi française stipule que le remplissage d’une piscine privée est strictement interdit dès le niveau 2, dit « alerte ». À ce stade, il est interdit de vidanger ou remplir les piscines privées, qu’elles soient hors-sol ou enterrées. Si une infraction est constatée, le détenteur de la piscine est alors passible d’une amende entre 1.000 et 3.000 euros.
Interrogé par nos confrères de Nice-Matin, Nicolas Roche, professeur à l’université Aix-Marseille et expert en hydrologie, met en lumière l’enjeu de l’utilisation « récréative de l’eau ». Selon lui, il faut faire la différence « entre un usage de loisir et un usage vital ». Selon le Centre d’information sur l’eau, le remplissage d’une piscine privée est l’équivalent de 14.444 chasses d’eau ou encore de 4.643 lave-vaisselles.
Nicolas Roche précise :« La problématique de la gestion de l’eau doit rentrer dans une analyse globale. Il faut penser les choses en fonction de nos ressources en eau et de nos besoins ». Par ailleurs, Nicolas Roche se dit plutôt favorable à poser la question du prix de l’eau et à un encadrement resserré de son utilisation. En somme : faire des efforts sur le système de recyclage de l’eau de la piscine pour ne pas consommer trop d’eau en en rajoutant.
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Les écologistes ne veulent pas interdire les piscines privées
En août 2022 , le député Julien Bayou, a exigé « un autre rapport à l’eau ». Interrogé sur la sécheresse qui touche la France, l’ex-secrétaire national d’Europe-Écologie-Les Verts a indiqué qu’il n’était pas contre une interdiction des piscines privées, en cas de dernier recours. Et de poursuivre : « Vous comprenez que c’est l’absence d’action qui aujourd’hui fait qu’on ne peut plus utiliser l’eau ».
Rapidement, le principal intéressé a tenu à préciser sa pensée sur Twitter, estimant que BFMTV avait opéré un raccourci « racoleur » en relayant ses propos sur le réseau social. « C’est racoleur : que l’on me comprenne bien, faute d’anticipation, il y a DÉJÀ des restrictions d’utilisation sur l’eau, pour laver les voitures et parfois pour remplir les piscines. L’enjeu ce n’est pas d’interdire les piscines c’est de garantir nos besoins vitaux en eau », a-t-il tweeté. Ceux qui le soutiennent insistent sur le risque que l’accès à l’eau potable soit menacé. C’est le cas de Mélanie Vogel, sénatrice écologiste.
Si la question de l’interdiction des piscines privées, soulevée par Julien Bayou, a fait polémique, selon un sondage Ifop, 82% des Français se disent favorables à réduire leur consommation en eau de manière générale.