Cette année, la COP28 se tient à Dubaï mais également à Bordeaux. L’association Scientifiques en rébellion organise une COP alternative ouverte au public. Au travers de tables rondes, débats, d’activités et d’événements artistiques, les scientifiques souhaitent “proposer autre chose que ces COP impuissantes”.
En même temps que le lancement de la COP28 à Dubaï, l’association Scientifiques en rébellion a lancé sa COP alternative à Bordeaux. Jusqu’au 3 décembre, à la Base sous-marine, tables-rondes, ateliers et représentations artistiques s’enchaîneront dans un rassemblement local et participatif. Elle s’inscrit dans le cadre de la campagne internationale “How much more climate failure can we take ?”, portée par Scientist rebellion. Celle-ci a pour but de catalyser l’action contre le dérèglement climatique.
Une COP alternative à Bordeaux
Face au constat de l’inefficacité des COP classiques, Scientifiques en rébellion a choisi d’organiser sa propre COP. Toutefois, l’association n’appelle pas au boycott de la COP de Dubaï. “Nous entendons jouer notre rôle dans cette partition : ni conseillers du prince, ni au service des pouvoirs technologiques et industriels, nous mettons nos méthodes et nos compétences au service du commun”, détaille les scientifiques.
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Tables rondes, débats, formes artistiques, rencontres, actions de désobéissance civile non violente et discussions, ces quatre jours ont un emploi du temps chargé. “Le programme est ambitieux : il est à la hauteur des enjeux auxquels l’humanité doit faire face. De nombreuses organisations, associations, mouvements ont répondu à notre appel”, se réjouit l’association. Dès la première journée, après un après-midi de rencontres et de débats, les scientifiques ont lancé leur première action. Depuis le Pont Jacques Chaban-Delmas, ils ont déployé plusieurs slogans lumineux “appelant à rejoindre l’alter-COP et plus largement le mouvement de lutte contre le réchauffement climatique”.
Le grand public, acteur indispensable de cette COP
La COP de Bordeaux est ouverte au public. Au travers des différents ateliers et conférences, les visiteurs sont invités à participer aux discussions. “Le procès de TotalEnergies, par exemple, va être très participatif. Les gens du public vont être amenés à discuter des rôles des différents protagonistes dans le procès et vont même aller jusqu’à incarner l’un ou l’une des personnages lors du procès, précise Julian Carrey, physicien et membre de Scientifiques en Rébellion. L’autre partie, c’est que beaucoup de membres de scientifiques en rébellion vont être présents à l’alter-COP. Nous espérons vraiment profiter de beaucoup d’échanges informels avec les visiteurs”.
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Pour Scientifiques en rébellion, cette participation du public est extrêmement importante. “On s’aperçoit que pour faire face à l’urgence écologique, il y a vraiment besoin d’emmener toute la société avec nous. Pour l’instant ce n’est pas encore complètement le cas. Il y a donc encore vraiment beaucoup d’efforts de vulgarisation et de transmission de connaissances à faire en direction du grand public. Réciproquement, il faut que nous puissions échanger avec les gens pour savoir quelle est leur perception de la situation, comment est-ce qu’ils envisagent l’avenir, c’est fondamental”, précise Julian Carrey.
Une réponse à l’échec des COP
Si Scientifiques en rébellion, la branche française de l’association Scientist rebellion, organise cette COP alternative, c’est avant tout à cause de l’échec des COP “classiques”. En effet, lors de la première COP, en 1992, les États s’étaient déjà engagés à lutter contre le dérèglement climatique. Or, comme l’explique Scientifiques en rébellion “27 COP plus tard, les émissions de carbone sont 60% supérieures à ce qu’elles étaient en 1992 et le constat d’échec est patent”.
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Julian Carrey détaille ce message. “Lorsque les COP ont été créées il y a trente ans, les mots ‘croissance économique’, ‘croissance durable’, ‘utilisation de la richesse pour s’adapter au réchauffement climatique’ étaient au cœur des discussions. Aujourd’hui, on voit que c’est toujours le cas”. Si certaines COP ont abouti à des avancées concrètes, notamment l’accord de Paris signé en 2015 lors de la COP 21, “aucune n’a fixé aux États l’obligation réelle de respecter les engagements pris”, explique l’association.
La COP28, organisée dans des conditions particulières
Autre point d’arrêt pour les scientifiques, la COP28 est organisée à Dubaï, première ville des Émirats arabes unis. Or, ce pays est le 3e producteur de pétrole au monde selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE). De plus, cette année, la COP est “sous la présidence du magnat du pétrole Ahmed Al Jaber, PDG d’ADNOC, plus grosse entreprise d’hydrocarbures des Emirats arabes unis qui annonçait récemment vouloir augmenter de plus de 25% sa production d’énergies fossiles en 5 ans – et utilisera la COP pour légitimer encore davantage la production et l’utilisation d’énergies fossiles”, présente Scientifiques en rébellion.
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De plus, la présence de plus en plus grande des lobbies industriels, notamment des industries pétro-gazières, pèse sur les négociations. D’après l’association la “ “délégation” [des lobbies industriels] a aujourd’hui plus de poids que celles des décideurs politiques”. Cette situation entrave la création de mesures ambitieuses. “Nous sommes maintenant terrifié⸱es car en dépit de toutes les alertes, et dans un contexte de crise démocratique croissante, ces mêmes politiques irrationnelles et dévastatrices perdurent. Nous sommes terrifié⸱es. Mais pas résigné⸱es”, explique Scientifiques en rébellion.