L’agence internationale de l’énergie annonce une nouvelle hausse des émissions mondiales de CO2 et de méthane due à l’énergie en 2022. Les émissions restent sur « une trajectoire de croissance insoutenable« , appelant à des « actions plus fortes pour accélérer la transition », partage l’agence.
En janvier, le service Copernicus de l’Union européenne sur le changement climatique relevait que les concentrations atmosphériques en méthane et dioxyde de carbone avaient atteint de nouveaux records en 2022. Ce jeudi 2 mars, l’agence internationale de l’énergie (AIE) nous révèle dans un nouveau rapport que les émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie ont atteint « un nouveau record de plus » en 2022.
Par rapport à 2021, les émissions de CO2 ont augmenté de 321 millions de tonnes (Mt) , soit +0,9%, annonce l’AIE. Elles atteignent ainsi plus de 36,8 milliards de tonnes. Lorsqu’on y ajoute les émissions de méthane et de protoxyde d’azote liées à l’énergie, la hausse s’élève à 1 % pour atteindre un niveau record de 41,3 milliards de tonnes de CO2-équivalent (Gt de CO2-eq).
Les émissions de CO2 provenant de la combustion d’énergie et des processus industriels ont ainsi représenté 89 % des émissions de gaz à effet de serre liées à l’énergie en 2022. Malgré les prix élevés du gaz naturel, les émissions de méthane provenant de la combustion de l’énergie, des fuites, du torchage et de la mise à l’air représentent 10 % des émissions de CO2-eq associées au secteur de l’énergie, principalement en raison des opérations pétrolières et gazières.
Une hausse des émissions plus faible que prévue
Les analystes scrutent avec intérêt ces émissions qui représentent plus des trois quarts du total des émissions mondiales de gaz à effet de serre et servent d’indicateur à la réussite de la transition énergétique. Cette année, la hausse des émissions est décorrélée de la croissance économique mondiale (+3,2%), précise l’AIE. En 2021, les émissions avaient bondi de plus de 6% suite à un recul inédit de 5,8% en 2020.
Le dernier rapport du GIEC souligne l’importance d’inverser la courbe mondiale des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2025 pour limiter la hausse des températures à 1,5°C à la fin du siècle. Même si l’AIE constate une hausse des émissions moins forte que prévue, dans un contexte de crise énergétique, elle souligne que les émissions restent sur « une trajectoire de croissance insoutenable ». Elle appelle ainsi à des « actions plus fortes pour accélérer la transition vers une énergie propre et mettre le monde sur la voie de la réalisation de ses objectifs énergétiques et climatiques« .
Alors qu’il faudrait fortement réduire le recours aux énergies fossiles, les émissions liées au pétrole et au charbon ont respectivement augmenté de 268 Mt (+2,5%) et de 243 Mt (+1,6%), contrebalançant largement la baisse de 118 Mt (-1,6%) des émissions liées au gaz. Environ la moitié de l’augmentation des émissions dues au pétrole provient du rebond de l’aviation qui revient à 80% de son niveau de 2019, après le creux pandémique. « Les compagnies internationales et nationales du secteur des énergies fossiles engrangent des revenus records et doivent prendre leur part de responsabilité, en cohérence avec leurs engagements publics à l’égard du climat, souligne Fatih Birol. Elles doivent revoir leurs stratégies dans le sens d’une réduction réelle de leurs émissions. »
L’indispensable rôle des énergies renouvelables
L’agence reconnait que la situation aurait pu être bien pires dans le contexte actuel. « Le risque d’une croissance débridée des émissions en raison du recours accru au charbon dans le contexte de crise énergétique, ne s’est pas matérialisé, l’essor des énergies solaire et éolienne, des voitures électriques, de l’efficacité énergétique et d’autres facteurs ayant freiné la montée du CO2″, avance l’AIE.
Parmi les causes expliquant la hausse des émissions, l’agence avance les phénomènes météorologiques extrêmes et la mise à l’arrêt d’un nombre inhabituellement élevé de centrales nucléaires. Toutefois, 550 Mt d’émissions supplémentaires ont été évitées grâce au déploiement accru de technologies bas carbone, notamment l’éolien et le solaire photovoltaïque, estime l’agence. La réduction de la production industrielle, en particulier en Chine et en Europe, a également évité des émissions supplémentaires. « Sans énergie propre, la croissance des émissions de CO2 aurait été presque trois fois plus élevée », calcule Fatih Birol, directeur exécutif de l’AIE.
En Asie, hors Chine, les émissions ont augmenté de 4,2%, reflétant la croissance rapide de leur économie et de leur demande énergétique. Avec les restrictions anti-Covid, la Chine, reste sensiblement au même niveau d’émissions (-0,2%) qu’en 2021. Dans l’Union européen, les émissions ont diminué de 2,5% grâce au déploiement record d’énergies renouvelables, à un démarrage en douceur de l’hiver et aux mesures de sobriété énergétique. Aux États-Unis, les émissions ont augmenté de 0,8%, avec une forte hausse de la demande énergétique des bâtiments en raison de températures extrêmement basses.