L’arrivée du printemps apporte avec elle sont lot d’oiseaux migrateurs. Enfin si tout se passe bien pour eux. Avec le dérèglement climatique et la destruction des habitats de reproduction de ces espèces, leur survie n’est plus assurée.
Le dérèglement climatique et ses conséquences mettent à rude épreuve la santé des populations d’oiseaux migrateurs en France. Dès le 17 février, le public pourra signaler la présence d’hirondelles, sur le site de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et suivre chez nos consœurs et confrères de BFMTV, l’avancée de leur retour dans l’hexagone. L’occasion de faire le points sur les grands enjeux liés aux oiseaux migrateurs.
Car oui. Le nombre d’hirondelles a chuté de 40% sur les 30 dernières années selon l’Office français de la biodiversité. « Et ce n’est pas la seule espèce qui est menacée par les changements de températures ou par la modification volontaire par l’homme de son habitat de reproduction », alerte Louis Sallé, chercheur en ornithologie à la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et co-auteur de l’Atlas des oiseaux migrateurs de France, paru le 15 septembre 2022 aux éditions Biotope Eds (120 €). Cet Atlas, de 1.150 pages, recense les données de 319 espèces d’oiseaux migrateurs de France. « Le constat est que de nombreux problèmes pèsent sur elles. » Pourtant l’étude de ces oiseaux migrateurs relève d’une importance capitale pour la biodiversité. « En France il y a entre 350 et 400 espèces régulières d’oiseaux. Parmi elles, au moins 319, recensées dans l’Atlas, sont des espèces d’oiseaux migrateurs », informe Louis Sallé.
Plusieurs zones à protéger pour la sauvegarde de ces oiseaux
Les oiseaux migrateurs sont mobiles. Bien qu’évidente, cette particularité est d’une grande importance. « Car pour la préservation des espèces, nous devons protéger des zones d’hivernage mais également de nidification », explique Louis Sallé. Une zone d’hivernage est un territoire ou une portion de territoire où hiverne une population plus ou moins importante d’une espèce animale. Une zone de nidification est quant à elle est la zone dans laquelle les oiseaux se reproduisent. « Cela représente des surfaces de déplacement immenses, rendant les observations difficiles », dit-il.
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Les observateurs s’inquiètent de la durée d’hivernage des oiseaux après de longs voyages entre l’Europe et l’Afrique. « Certaines espèces partent plus tard et reviennent plus tôt d’Afrique. Mais ces oiseaux ont besoin d’un certain temps dans leur zone d’hivernage pour accumuler assez de ressources afin de faire le chemin retour jusqu’en Europe et se reproduire », ajoute l’auteur.
Le dérèglement climatique comme grande menace
Si les temps de passage ne sont plus bons, c’est en grande partie à cause du dérèglement climatique. « Avec les fluctuations de températures, les habitats idéals de certaines espèces d’oiseaux, qui étaient dans le Sud, vont progressivement remonter vers le Nord », redoute Louis Sallé. « Prenons l’exemple du Gobemouche. Cette espèce va calculer sa migration au printemps, saison à laquelle les arbres vont se développer. Il va y trouver des chenilles pour nourrir ses petits. L’oiseau doit être synchronisé avec ce ‘pic’ de nourriture pour mener à bien sa reproduction », explique-t-il. La crise climatique dérègle tout. Le cycle reproducteur du Gobemouche est donc menacé.
De nombreuses espèces souffrent de ce problème. « Certains exemples sont marquants. La Bondrée apivore est une buse qui mange des guêpes et des abeilles. Nous avons constaté qu’elle a avancé sa date de passage en automne de quatre jours en 37 ans dans sa zone de suivi en France. Le Milan noir a quant à lui avancé sa date de 11 jours au printemps en 31 ans. Un tel changement en quelques générations est colossal », remarque-t-il.
L’activité humaine pointée du doigt
Pour la LPO, l’une des causes principales de ces bouleversements est l’intensification des pratiques agricoles en Europe. « En retournant la terre, certaines espèces d’insectes sont tués, ou s’en vont. Il s’agit pourtant de la source principale de nourriture de plusieurs oiseaux migrateurs », explique Louis Sallé. « La tourterelle des bois est une espèce particulièrement menacée aujourd’hui. Son habitat de reproduction – les marais boisés – est massacré, au profit de grandes surfaces agricoles. En plus de cela, l’espèce est chassée. Sa population a décliné de 50% en 20 ans en France. »
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La Commission européenne a, part ailleurs, demandé à la France, le 26 janvier dernier, de mettre fin aux méthodes illégales de chasse aux oiseaux, comme le recours à la glu, régulièrement dénoncée par les défenseurs de l’environnement. « La chasse reste un facteur aggravant. En moyenne, les pays européens ne permettent la chasse que de 5 espèces en mauvais état de conservation. En France, nous chassons un total de 20 espèces menacées de disparition.17 sont des espèces d’oiseaux migrateurs », regrette-t-il.
La pollution lumineuse met également à mal la migration des oiseaux. Deux espèces d’oiseaux migrateurs sur trois voyagent de nuit, pour éviter les prédateurs et pour se repérer grâce aux étoiles. Certaines espèces trouvent leur chemin grâce à la lumière des étoiles et de la lune. L’obscurité et la visibilité des étoiles est essentielle pour la survie de ces espèces et pour mener à bien ce trajet.