L’industrie des matières plastiques a été fortement affectée par la pandémie de Covid-19 en Europe. PlasticsEurope, l’association européenne qui représente les producteurs de matières plastiques, présente aujourd’hui ses chiffres pour l’année 2020. Elle appelle le gouvernement français à clarifier son cadre réglementaire national, qu’elle juge contradictoire.
Le ralentissement de la hausse de la production et de la demande de matières plastiques constatée depuis 2017 se poursuit. C’est le constat fait par PlasticsEurope, l’association qui regroupe les producteurs de matières plastiques européens. En 2020, cette baisse a été très largement amplifiée par la crise de la Covid-19. La production européenne a en effet reculé de 5,1% l’année dernière, avec 55 millions de tonnes (Mt) de matières plastiques produites. En France, c’est le double avec une chute de 11% de la production. En dix ans, la part de l’Europe dans la production mondiale est passée de 21 à 15%.
PlasticsEurope estime à 367 Mt la production mondiale de matières plastiques en 2020. Elle a diminué de 0,3% cette année. Une baisse qui souligne l’impact de la crise sanitaire sur l’économie mondiale. En effet, l’industrie des plastiques n’avait enregistré de baisse d’activité que lors de deux crises mondiales majeures, rappelle PlasticsEurope. Il s’agissait du premier choc pétrolier en 1973 et de la crise financière en 2008.
Une baisse dans tous les secteurs d’application
Cette baisse de la production s’explique logiquement par la pandémie. Les secteurs clients ont en effet enregistré une baisse d’activité durant cette période. La demande européenne a ainsi reculé de 4,7%, et la demande française de 7,5%.
Le secteur automobile, qui a connu des arrêts de production, a été le plus touché. Sa consommation de matières plastiques a baissé de 18,5% à l’échelle européenne, et de 28% en France. Le bâtiment s’en sort le mieux, avec une baisse d’1% en Europe et de 4% en France.
Le secteur de l’emballage est le principal débouché des matières plastiques. L’idée reçue selon laquelle le secteur aurait profité de la crise sanitaire n’est pas vérifiée. Sa consommation de matières plastiques a baissé de 2,5% en Europe, et de près de 7% au niveau national. Enfin, si le secteur médical a connu une hausse en raison de la pandémie, il ne représente qu’environ 2% du marché des matières plastiques.
Les inquiétudes de la filière
PlasticsEurope s’inquiète de la possibilité de nouvelles interdictions ou restrictions nationales sur les produits contenant du plastique. L’association professionnelle insiste sur le contexte économique encore incertain, et les restrictions déjà adoptées en particulier dans le cadre de la loi anti-gaspillage en 2020.
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Toute nouvelle interdiction ou restriction « fragiliserait toujours plus la part de la France et la compétitivité de ses entreprises sur le marché européen des plastiques ». PlasticsEurope poursuit en soulignant « l’ambiguïté » des conditions d’un amendement du projet de Loi Climat et Résilience. Discuté en Commission au Sénat, il corrige l’interdiction des emballages en polystyrène. Il prévoit de limiter l’interdiction aux emballages en polystyrène « non recyclables et dans l’incapacité d’intégrer une filière de recyclage ». Cet amendement ne doit pas « remettre en question les investissements prévus en France dans des unités de recyclage chimique du polystyrène », alerte PlasticsEurope.
L’association professionnelle pointe du doigt une « contradiction évidente » entre l’objectif « peu réaliste » de 100% de plastiques recyclés en 2025, et la volonté gouvernementale de retirer des catégories d’emballages plastiques du marché. Les emballages plastiques représentent en effet 60% du gisement des plastiques à recycler. « Il ne faut pas décourager nos membres à l’heure où ils sont pleinement engagés dans l’économie circulaire des plastiques, tant en Europe qu’en France. Il est impératif que soient garantis les approvisionnements des unités de recyclage chimique dans lesquelles ils investissent massivement », prévient Eric Quenet, directeur de PlasticsEurope pour la France.
Pendant que l’Europe recule, la Chine et les États-Unis avancent
La Chine, principal producteur des matières plastiques (32%), est la seule économie majeure à enregistrer une croissance de son PIB (produit intérieur brut) en 2020 (+2,3%). Cela s’explique par la maîtrise, dès l’automne 2020, de l’épidémie dans le pays. La production en Amérique du Nord est quand à elle restée stable (environ 70 Mt) malgré la chute de 3,5% du PIB des États-Unis.
Ces tendances, amplifiées par la crise sanitaire, sont observables depuis une décennie. La production chinoise a presque doublé en dix ans, passant de 64 Mt à près de 120 Mt en 2020. Cela fait du continent asiatique la principale zone de production. Plus de la moitié des matières plastiques sont en effet produites en Asie.
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Sur les cinq dernières années, de nouvelles unités de polymères – les structures moléculaires de base des plastiques – ont permis à l’Amérique du Nord d’augmenter sa production de plus d’un tiers.
Une reprise de l’activité confirmée
Dans la seconde partie de 2020, la demande a repris en Europe à mesure que les situations sanitaires des pays s’amélioraient. Cela s’est traduit par une forte reprise de la production européenne. En France, où l’automobile et le bâtiment ont été à l’arrêt durant le premier confinement, le phénomène est plus accentué.
Globalement, le premier trimestre 2021 confirme la reprise de l’activité des principaux secteurs clients. Seul le secteur automobile continue de chuter, avec une baisse d’activité de 9% par rapport au dernier trimestre 2020.
La baisse de la production, combinée à celle des importations et des stocks, crée des tensions sur un marché caractérisé par le dynamisme de la demande. Ce contexte explique la remontée des prix des polymères. Après avoir baissé de 7% en 2020, la moyenne de l’ensemble des prix des polymères a augmenté de 8% au début 2021 par rapport au dernier trimestre de 2020. « Ces tendances devraient se poursuivre à court terme et conditionner la reprise de l’activité économique », conclut PlasticsEurope.
Jérémy Hernando