À quelques heures de la montée des marches du 75e Festival de Cannes, l’évènement phare du cinéma mondial confirme ses engagements symboliques en faveur de l’environnement. Des mesures avant tout pédagogiques, adoptées il y a un an et qui semblent s’installer.
Le Festival de Cannes … Ses cinéastes, sa montée des marches, son effervescence artistique et son bilan environnemental désastreux ! Afin de rompre avec cette réputation peu reluisante à l’heure de l’urgence climatique, les organisateurs du plus grand festival international de cinéma ont décidé, lors de son édition 2021, de prendre à bras de corps la question écologique.
Véhicules électriques, tapis rouges recyclés, fin des bouteilles d’eau en plastique ou encore « contribution environnementale » des festivaliers. Une série de mesures annoncées en grande pompe devaient permettre de réduire l’impact environnemental du festival. Un an plus tard, à la veille du lancement de sa 75ème édition – qui se tiendra du 17 au 28 mai prochain – la plupart des mesures adoptées perdurent.
Une série de mesures encourageantes … mais cosmétiques
En 2021, Thierry Frémaux, délégué général du festival et Pierre Lescure, son président, annonçaient « douze mesures significatives« . Les organisateurs expliquent ainsi avoir diminué de 79% le poids de leurs impressions papier – essentiellement le programme de l’événement – entre 2019 et 2021. De même, le volume total de tapis rouge a été réduit de 59%. Il a ensuite été collecté et en partie « réintroduit dans le cercle de la culture et de la création de la région PACA », explique-t-on sur le site du festival. En matière de réduction, les 22.000 bouteilles d’eau à usage unique utilisées en 2019 ont entièrement disparu. Les organisateurs s’enorgueillissent par ailleurs d’un meilleur tri des déchets lors de la 74e édition.
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« Forcément, recycler le tapis rouge ne va pas suffire à révolutionner l’impact environnemental du Festival de Cannes. On peut se dire que cette mesure n’est pas vraiment proportionnée à l’enjeu », note Juliette Vigoureux, pilote du projet cinéma du Plan de transformation de l’économie française du Shift project. Derrière l’immense majorité des émissions de gaz à effet de serre du festival se cachent les déplacements des participants. « Sans parler de désinternationaliser Cannes, on peut être vigilant aux déplacements des festivaliers, souligne Juliette Vigoureux. Notamment, il est possible de voyager de Paris à Nice en train plutôt qu’en avion ». Pour l’heure, le festival annonce détenir une flotte de véhicules automobiles entièrement électrique ou hybride pour les déplacements locaux.
Un vrai enjeu de sensibilisation
Au-delà de leur caractère symbolique, Juliette Vigoureux salue toutefois l’intérêt pédagogique de telles mesures. « Cannes, c’est le comble du glamour, du cinéma dans sa plus pure expression. Si cet évènement s’intéresse à son impact environnemental, il peut permettre de sensibiliser un autre public », explique la consultante. Ainsi, depuis l’an passé, chaque festivalier doit s’acquitter d’une « contribution » d’une vingtaine d’euros, censée compenser son empreinte environnementale. Le Festival indique que ces contributions ont permis l’an passé de financer à hauteur de 400.000 euros six projets locaux et internationaux. Parmi eux, un projet de reboisements dans l’arrière-pays de Grasse à la suite d’incendies intervenus en 2017.
Nouveauté cette année : le collectif Ecoprod poursuit la sensibilisation des cinéastes et leur public. Il décernera un prix spécial récompensant « les équipes ayant mis en place une démarche d’éco-production, qui ont fait des efforts significatifs pour la protection du climat et du vivant » sur leur tournage. Pas sûr toutefois que les très attendus Top Gun : Maverick – retour des aventures de Tom Cruise en avion de chasse – et Les Crimes du futur – dernier film de David Cronenberg, truffé d’effets visuels – soient candidats. Pour ce qui est d’imaginer des mondes conformes à une certaine sobriété environnementale, la fine fleur du cinéma a encore quelques progrès à faire.