Rencontre avec la maire de Paris Anne Hidalgo, candidate du Parti socialiste à l’élection présidentielle. Elle défend un programme qui se dit répondre aux trois crises sociale, écologique et démocratique.
« En 2030, on sera dans l’irréversibilité climatique, donc le prochain quinquennat est absolument décisif », prévient d’emblée Anne Hidalgo. Il est 8 heures du matin ce mardi 25 janvier et la candidate du Parti socialiste (PS) à l’élection présidentielle débute fièrement la présentation de son programme écologique. Elle a donné rendez-vous ce jour aux membres de l’Association des journalistes de l’environnement (AJE) dans son QG de campagne, situé près de la Gare de Lyon à Paris.
Installée fièrement sous son slogan HIDALGO!2022, la candidate entame la présentation des contours de son programme écologique. Pour bâtir son projet, la candidate du PS est partie « d’un diagnostic de l’état de notre pays, de l’état du monde, de l’Europe », assure-t-elle. Et il en ressort « trois crises simultanées qui se nourrissent les unes les autres ».
La crise sociale au premier plan
Anne Hidalgo met ainsi au premier plan « la crise sociale avec ses inégalités qui partout sur la planète, fait rompre les pactes de confiance autour des démocraties ». Selon elle, cette perte de confiance frappe avant tout les classes moyennes et populaires, face à un avenir incertain. Et la peine est double : « les classes moyennes et les catégories populaires subissent l’impact des changements climatiques de façon plus dure, plus violente et moins maîtrisée », prévient-elle. Ainsi, elle l’assure : « mon programme fait le lien en permanence entre social et écologie ».
Le chercheur Carlos Moreno, expert des villes et territoires de demain, veut rendre « hommage » au combat d’Anne Hidalgo pour mettre en place la ville du quart d’heure et faire reculer la place de la voiture dans les grandes métropoles comme Paris. Au-delà de la mobilité, la crise des gilets jaunes appelle à repenser notre organisation. « Anne Hidalgo cherche à répondre au défi pour que les besoins essentiels soient satisfaits avec une proximité beaucoup plus riche », estime-t-il. Ainsi, le recul de la place de la voiture dans les zones rurales et périurbaines passera par « une proximité des services publics, des services de santé, des services culturels, des commerces, des lieux d’éducation et des loisirs ».
Un engagement pour l’écologie depuis 2014
Anne Hidalgo dit avoir acquis sa conscience écologique durant sa carrière politique, sensibilisée par le prisme social des impacts environnementaux. Et c’est pourquoi elle voit dans la crise écologique, la deuxième urgence à laquelle s’attaquer. Une urgence qu’elle connaît bien depuis 2014 à la mairie de Paris. « J’ai fais du thème de l’écologie un thème central qui permet par exemple dans mon activité de maire de Paris de réorganiser, d’assurer une transformation de la ville qui tienne compte de ce qui va se passer pour les générations à venir : le changement climatique, l’élévation des températures, les pics de chaleur, les inondations et la pollution de l’air… »
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Prendre en compte les enjeux écologiques en politique n’est pas toujours chose aisée et elle s’est frottée à plusieurs lobbies, notamment lorsqu’elle a voulu faire reculer la place de la voiture et la pollution de l’air. « Je les ai vus me menacer et m’expliquer comment ils allaient me faire battre à Paris, comment ils allaient me faire passer pour une mauvaise maire si je ne changeais pas mon discours sur la pollution de la question aux particules », se défend-elle.
Lier les questions écologiques et sociales
Outre les lobbies, le deuxième élément de résistance à la transition écologique est « le pouvoir d’achat », estime Anne Hidalgo. Elle reprend à son compte la fameuse opposition « fin du monde fin du mois », un sujet important de la crise des gilets jaunes. Elle veut ainsi poser des questions économiques structurantes pour répondre à ce défi. Son programme s’axe ainsi sur la réindustrialisation, la décarbonation, la fiscalité… « Baisser la TVA sur les produits verts, mettre une taxe aux frontières de l’Europe pour ne pas être envahie par des produits qui soient des produits à très très fort impact environnemental produits à des milliers de kilomètres de chez nous « , propose-t-elle.
En parallèle de mesures structurantes, elle propose des mesures individuelles pour accompagner les Françaises et les Français dans l’accélération de la transition écologique. Et ce, « sans qu’il y ait d’opposition entre je dirais le pouvoir d’achat et la nécessité d’avancer », nuance-t-elle. Pour la rénovation thermique, elle propose ainsi un tiers payant pour les propriétaires, c’est-à-dire une avance du montant des travaux, remboursable au moment de la vente du bien. Elle propose aussi un « leasing social » sur les véhicules pour les personnes qui en sont dépendantes pour aller travailler et pour qui un véhicule électrique coûte trop cher. « Ce leasing social mettrait la voiture électrique au prix d’une voiture thermique sur des conditions de ressources », propose Anne Hidalgo.
Ne pas oublier l’urgence démocratique
Pour la candidate PS, la troisième urgence est démocratique. « Quand les classes moyennes doutent, c’est la porte ouverte au populisme », assure-t-elle. Elle souhaite ainsi redonner un pouvoir d’intervention directe aux citoyens dans la vie démocratique, en intégrant notamment le référendum d’initiative citoyenne (RIC). « Le RIC était dans toutes les propositions des gilets jaunes et on le retrouve à peu près dans tous les cahiers de doléances », rappelle-t-elle.
Pour assurer la continuité de la démocratie directe entre les élections, Anne Hidalgo souhaite mettre en place des formes consultatives, au-delà du référendum, par exemple par le biais d’amendements citoyens. Dans chaque département, elle souhaiterait la mise en place d’un conseil départemental, un espace à disposition des citoyens et des élus pour créer les consultations. « Il serait le point d’appui à la fois pour les députés qui voudraient intégrer les citoyens dans un processus législatif ou qui voudraient s’appuyer sur leurs idées », imagine-t-elle.
En plus, l’actuelle maire de Paris souhaite introduire la proportionnelle en modifiant le mode d’élection des députés. « Comme en Allemagne, on garderait une voie d’élection directe au suffrage uninominal de députés et on cocherait une case qui attribue des voix à un parti, ce qui entraîne un rééquilibrage à l’Assemblée par un nombre de députés qui proviennent de cette branche proportionnelle. »