Nicolas Hulot a présenté ce matin en Conseil des ministres son Projet de loi mettant fin à la recherche et à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels d’ici 2040. Une brique de son Plan climat qui signe aussi la fin du débat sur les gaz de schistes. Toute exploration et exploitation sera interdite, quelle que soit la technique utilisée.

Nicolas Hulot annonce la fin des permis d’exploitation d’hydrocarbures en France pour 2040. PHOTO//Ministère de la Transition
Les scientifiques du GIEC sont formels : pour contenir le réchauffement climatique sous les 2°C en 2100, il faut renoncer à exploiter 80% des réserves d’hydrocarbures. Il faut donc arrêter de les rechercher. Et c’est précisément ce que fera la loi présentée ce matin ! Elle mettra fin dès 2018 à tout nouveau permis de recherche d’hydrocabures en France, qu’ils soient conventionnels ou non conventionnels. Elle permettra également d’interdire le renouvellement de concessions d’exploitation existantes au-delà de 2040. Qu’elles soient situées sur terre, en mer, en métropole ou en Outre-mer.
« Cela générera une transformation profonde, radicale, notamment de notre modèle énergétique, a prévenu Nicolas Hulot, à l’issue du Conseil des ministres . Pour que cette transformation puisse se faire sans brutalité mais avec efficacité […], il faut de la prévisibilité, mais en même temps de l’irréversibilité et de la cohérence », justifie-t-il.
Plus aucune exploitation d’hydrocarbures en 2040?
Plusieurs demandes d’exploration ont été mises en attente par le gouvernement précédent. Certains permis d’exploration seront refusés, mais ceux déjà acquis seront respectés pour éviter les sanctions prévues par les contrats. Notamment, la France honorera bien le projet Guyane-Maritime, tout en se conformant au nouvel objectif de fin d’autorisation de renouvellement en 2040. Et ce « malgré les impacts catastrophiques et irréversibles sur les écosystèmes vulnérables marins ou côtiers de ce type de projet », regrette Greenpeace.
Ainsi, il est possible que quelques titres d’exploitation acquis avant l’échéance de 2040 soient encore valables au-delà. Mais, « si tel est le cas, cela sera tellement marginal ou résiduel que cela n’a pas beaucoup d’importance », prévient Nicolas Hulot. Notons également que le gaz de mine, s’accumulant dans les anciennes galeries de mines n’est pas concerné par ce projet de loi. Il continuera à être capté pour des raisons de sécurité et de protection de l’environnement.

Prévision de production d’hydrocarbures en France jusqu’en 2046. Source: Ministère de la Transition écologique et solidaire
Une loi pour booster la transition énergétique
La France produit environ 815.000 tonnes de pétrole par an et près de 160 millions de m³ de gaz. Cette production française ne couvre que 1% de la consommation nationale de pétrole et de gaz. La France importe donc massivement son pétrole et son gaz. Mais alors que François Duseux, Président de l’Union Française des industries pétrolières monte au créneau contre ce projet de loi, Nicolas Hulot voit plusieurs avantages à cette décision.
Le ministre de la transition écologique et solidaire y voit un triple effet bénéfique. « La France fait sa part », « met en oeuvre un agenda de santé publique » et « en se libérant des énergies fossiles, on se libère de conflits ». « C’est un acte fort, plus qu’un symbole », soutient-il. La France devient ainsi le premier grand Etat à prendre cette décision, unilatéralement. Mais, par cette mesure, elle souhaite entraîner les autres pays à faire de même. À l’occasion de la COP23 et du sommet sur le climat du 12 décembre, « la France va être légitime pour essayer de convaincre nos partenaires de faire de même », annonce Nicolas Hulot.
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La France veut assurer le leadership du Climat
Suite au rôle de la France dans l’élaboration de la feuille de route écrite à Paris, il est important que le pays maintienne « son leadership » et « donne l’exemple dans la mise en oeuvre de ses propres engagements », insiste Nicolas Hulot. Au-delà des engagements pris à Paris, la France s’est même engagée début Juillet, à travers son Plan Climat, à la neutralité carbone en 2050. Et le ministre avait alors annoncé la fin de la vente de voitures à essence et diesel dès 2040, ainsi que la fin de production d’électricité à partir de charbon dès 2022.
« Ce que j’annonce fait partie d’un tout, rappelle le successeur de Ségolène Royal. C’est à arrimer aux autres engagements de la loi de transition énergétique ». Cette loi adoptée en août 2015 prévoit en effet une baisse de 50 % de la consommation énergétique en 2050 par rapport à 2012, avec un objectif intermédiaire de 20 % en 2030. Pour cela, la loi prévoit le développement des énergies renouvelables et une réduction de la consommation énergétique primaire en énergies fossiles de 30% en 2030. Mais aussi la rénovation de l’ensemble des bâtiments à l’horizon 2050 en fonction des normes « bâtiment basse consommation ». Et la multiplication par 5 de la quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux de chaleur et de froid d’ici 2030.
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com