Sous l’égide du Dr Jung-Dae Kwon, une équipe de recherche coréenne a mis au point un film photovoltaïque d’un nouveau type. Souple, transparent et coloré, celui-ci pourrait jouer un grand rôle dans l’intégration de l’énergie solaire dans nos bâtiments et véhicules.
Pourrons-nous prochainement produire de l’électricité sur les toits de nos voitures sans en gâcher l’esthétisme ? C’est, entre autres, ce que laissent entendre les chercheurs du Département de l’énergie et des matériaux électroniques du Korean Institute of Materials Science (KIMS) dans un article paru le 3 août dans le Chemical Engineering Journal. Sous l’égide du Dr Jung-Dae Kwon, l’équipe fait état, dans cette étude, de la mise au point du “premier film photovoltaïque transparent sur un substrat flexible, présentant différentes couleurs réfléchies et sans réduction significative de l’efficacité de la cellule photovoltaïque, au monde”. Cette nouvelle technologie parvient à présenter les trois couleurs primaires physiques, à savoir le rouge, le bleu et le vert. Toutes ces caractéristiques lui confèrent un grand potentiel d’application industrielle pour différents types de panneaux solaires.
À l’instar des films photovoltaïques déjà existants, celui du KIMS est fin et souple. Il a également la capacité d’être transparent ou translucide. Ces atouts permettent au film photovoltaïque du KIMS de s’adapter à de nombreux usages et surfaces. “Les électrodes conductrices transparentes jouent un rôle crucial dans les applications où l’attrait esthétique est important et où des cellules solaires de multiples couleurs sont souvent requises, par exemple, l’intégration du photovoltaïque au véhicule (vehicle-integrated photovoltaic, VIVP) et au bâtiment (building-integrated photovoltaic, BIPV)”, expliquent les chercheurs du KIMS. Grâce à la qualité de sa transparence, l’innovation coréenne devient compatible avec un plus grand nombre d’usages.
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De la couleur grâce à l’oxyde de zinc enrichi à l’aluminium
La trouvaille majeure du KIMS est d’avoir développé un procédé qui permette d’obtenir des « cellules solaires flexibles et transparentes » (FTSC) sans pertes significatives de rendement due à la coloration. Habituellement, les films photovoltaïques colorés superposent deux types de matériaux différents pour disperser la lumière. En séparant la lumière du Soleil en ses couleurs constituantes et en jouant sur l’épaisseur des couches, ils peuvent apparaître de différentes couleurs. Par exemple, pour parvenir à cet effet, le Korean Institute of Energy Technology Evaluation and Planning (KETEP) utilisait en mai 2022 une superposition de couches d’oxyde d’indium-étain et de l’oxyde de zinc dopé à l’aluminium pour obtenir des films bleus, verts et rouges.
Pour sa solution innovante, le KIMS opte pour une solution qui n’utilise qu’un seul matériau pour disperser la lumière : l’oxyde de zinc enrichi à l’aluminium (AZO). L’alternance de couches d’AZO et d’AZO hydrogéné (AZO:H) permet la dispersion de la lumière. En ajustant l’épaisseur du film mince multicouche, il est possible de lui faire prendre l’une des trois couleurs primaires. Cela permet, selon le KIMS, d’améliorer les propriétés électriques et optiques et d’obtenir une différence d’indice de réfraction très basse.
Des couleurs vives et une grande efficacité
Jusqu’à présent, les films photovoltaïques colorés nécessitaient une différence élevée entre les indices de réfraction des deux matériaux utilisés. Cet indice désigne la capacité à faire changer de direction la lumière. Cette différence élevée entraînait une perte de rendement des cellules, à cause de la réflexion lumineuse.
Grâce à leur indice de réfraction réduit, les films du KIMS parviennent à réfléchir beaucoup moins de lumière. Ils absorbent alors une part plus importante de la lumière leur parvenant, tout en présentant des couleurs vives. “En designant un film fin multi-couches ayant une différence d’indice de réfraction de moins de 5%, la perte de réflexion dans la région de la lumière visible absorbée par les cellules solaires a été minimisée. [Cette technologie] peut être appliquée à de nombreux absorbeurs pour films photovoltaïques étant donné que son implémentation colorée ne réduit que très faiblement l’efficacité des cellules solaires”, affirment les chercheurs du KIMS.
Un film adapté à un grand nombre d’applications
Les FTSC bleus, verts, et rouges du KIMS disposent respectivement de capacités de production en électricité de 1,14, 1,29 et 1,22 watt par gramme de film. Les chercheurs coréens considèrent donc leur film photovoltaïque “comme ayant du potentiel » pour les applications liées aux véhicules. Ils ajoutent que les cellules solaires du film présentent un rendement oscillant entre 4,77 et 5,45 % selon les couleurs. Par rapport à des panneaux classiques, c’est peu. Engie indique que “les panneaux [photovoltaïques] les plus couramment installés ont un rendement situé entre 13% et 24%”. Le film photovoltaïque coloré génère donc moins d’électricité qu’un panneau solaire “classique”. Cependant, les bénéfices apportés par l’adaptabilité du film compenseraient ce faible rendement, considèrent les chercheurs de l’étude.
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Du fait de leur composition, même colorés, les films photovoltaïques du KIMS laissent passer la lumière. Cette fonction est très avantageuse pour de futures applications industrielles. Lorsque le FTSC est coloré, le taux de transmittance, soit la quantité de lumière visible arrivant à traverser le film photovoltaïque, varie entre 27% et 29%, selon que le film soit bleu, vert ou rouge. Le KIMS assure que ces résultats, combinés à ceux de la puissance et du rendement des cellules sont prometteurs. “Cela montre que les FTSC préparés à partir de diffuseurs AZO:H DBR peuvent accomplir de bonnes performances tout en conservant des transmittances similaires pour différentes couleurs, ce qui est un avantage significatif pour les applications VIPV et BIPV (liées aux véhicules et aux bâtiments, ndlr)” explique l’étude.
Un produit bientôt sur le marché ?
Les applications potentielles de ces nouveaux films photovoltaïques colorés sont nombreuses. Par exemple, les chercheurs du KIMS, prévoient d’installer ces nouvelles cellules sur le toit de voitures. Dans leur étude, les chercheurs envisagent déjà la future commercialisation de leur découverte. Selon eux, la production de ces nouveaux films solaires pourrait être “peu coûteuse”. L’auteur principal de l’étude Jung-dae Kwon déclare : “Lorsqu’elle sera commercialisée, cette technologie aidera à développer une technologie de filtres lumineux simple, des films photovoltaïques transparents et colorée à hauts rendements sur substrat flexibles, ainsi qu’aider à réaliser des systèmes BIPV pour des bâtiments modernes et des systèmes VIPV pour des véhicules esthétiques”.