À l’occasion du 58ème salon de l’agriculture, qui ouvrira ses portes ce samedi 26 février, le mouvement Terre de liens publie son premier rapport sur l’état des terres agricoles en France. Celui-ci révèle que d’ici dix ans, 25% des agricultrices et agriculteurs français partiront à la retraite. Une occasion de repenser un modèle agricole, menacé par l’agrandissement des fermes et l’artificialisation des sols.

Ce mardi, Terre de liens dévoile son premier rapport sur l’état des terres agricoles en France. // PHOTO : Pixabay.
« 5 millions d’hectares de terre, 20% de la surface agricole française, vont changer de main d’ici dix ans », souligne le mouvement Terre de liens dans son premier rapport sur l’état des terres agricoles en France. Publié à l’occasion du 58ème Salon de l’agriculture, qui ouvrira ses portes ce samedi 26 février, ce condensé des données existantes en la matière relève les tendances passées et une période de transition à venir, du fait du départ à la retraite de 25% des agriculteurs et agricultrices françaises d’ici dix ans.
Terre de lien dresse d’abord un constat alarmant : depuis 1950, la France a perdu 17 millions d’hectares de terres agricoles, 1,9 million de fermes et la part d’actifs agricoles est passé de 31 à 2,5%. « Ce processus est irréversible, c’est un bien commun que l’on est en train de détruire », alerte Tanguy Martin, animateur territorial de Terre de liens Pays-de-la-Loire. Afin d’inverser cette tendance, l’association appelle à repenser le modèle agricole français à l’aune du période de chamboulements.
Artificialisation et concentration des terres
Terre de liens alerte dans un premier temps sur une tendance constante : l’artificialisation des sols, au détriment des terres agricoles. En 1950, les terres agricoles occupaient 72% du territoire national, contre 52% actuellement, grignotés notamment par l’étalement des habitats et des infrastructures. « Chaque année, une surface permettant de nourrir une ville comme Le Havre est perdue », explique Tanguy Martin. « Quand on imperméabilise un sol, il n’y a pas de retour en arrière possible. À l’échelle humaine, ce sol est perdu », déplore Isabelle Feix, experte sol de l’Ademe dans le cadre de ce rapport.
Parallèlement, Terre de liens note une tendance à la concentration des terres agricoles. Entre 1988 et 2020, le mouvement souligne que la surface agricole moyenne est passée de 24 à 69 hectares. Les « grandes exploitations », d’une surface moyenne de 136 hectares, représentent actuellement une ferme sur cinq. L’une des causes de cet agrandissement : la Politique agricole commune (PAC) dont les aides sont conditionnées à la surface d’exploitation des fermes. « L’agrandissement reste perçu comme un moyen de maintenir [ses] revenus », note de plus le groupe Safer dans le rapport sur l’état des terres agricoles en France.
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La difficulté de transmettre ses terres
« Lors de mes recherches, je trouvais des terres mais elles étaient toujours immenses », explique Emeric Duclaux, repreneur d’une exploitation de cinq hectares. Le producteur de petits fruits bio a mis plus d’un an avant de trouver une offre de parcelle à taille raisonnable en Haute-Loire. « À un moment donné, les fermes seront tellement grandes qu’elles ne pourront plus être reprises. On sera sur le modèle de sociétés privées qui emploie des salariés agricoles », alerte Tanguy Martin.
Du côté des exploitants qui cherchent à céder leurs terres, le casse-tête est équivalent. « Mes terres, je les avais dans la peau. Comme nombre d’agriculteurs, mes parents me les avaient transmises », témoigne Loïc Gaudin dans le rapport de Terre de liens. Au moment de partir à la retraite, il a bénéficié de l’aide de l’association qui a acheté sa ferme avant de la louer à un jeune agriculteur ayant à cœur de respecter son savoir-faire.
Terre de liens appelle à repenser notre modèle agricole
Afin de renverser les tendances observées dans son premier rapport, Terre de liens invoque quatre grands principes. Le mouvement souhaite que les candidats et candidates à l’élection présidentielle s’engagent « pour une grande loi sur les terres agricoles ». Tout d’abord, l’association appelle à « préserver les terres agricoles et leur usage ». Puis à « faciliter l’accès aux terres », notamment pour les plus jeunes exploitants non issus du milieu agricole. Enfin, elle invite à « favoriser les pratiques vertueuses » et à « développer une gouvernance démocratique et transparente des terres agricoles ».
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