« Quirra, poubelle des armées », de Livio Caepra et Françoise Begu (52’) témoigne de l’impact des essais militaires sur l’environnement de la Sardaigne et sur la santé de ses habitants.
Dans le Sud-Est de la Sardaigne, à Quirra, derrière les paysages paradisiaques, se cache une réalité beaucoup plus noire… Bienvenue au Polygone d’expérimentation de Quirra! C’est une vaste zone militaire s’étendant sur 127 km2 en terre et 28 000 km2 en mer. Depuis plusieurs décennies, l’OTAN, les armées du monde entier et les fabricants d’armes y expérimentent leurs nouveaux missiles et y font exploser leurs anciens.
Sur le banc des accusés : le groupe français MBDA, filiale d’EADS. Il y a fait exploser environ 1.200 de ses missiles Milan. En explosant, ces derniers dégagent du thorium, une substance radioactive qui se disperse dans l’air avant de retomber sur le sol. Chaque tête de missile contenant environ 35 g de thorium, il apparaît que plusieurs kg de produits ont été dispersés sur l’ensemble du territoire.
Des impacts sanitaires ?
Dans la zone, on constate de nombreux décès prématurés. On a relevé des taux anormalement importants de cancers et de malformations chez les animaux et les nouveau-nés. Ces faits ont été dévoilés grâce à Domenico Fiordalisi, procureur de Lanusei. Ce dernier a ouvert une enquête sur les impacts sanitaires et environnementaux du Polygone. « Nous avons compté environ 167 personnes malades de leucémie ou de tumeurs potentiellement liées à leur présence dans la zone militaire ou aux alentours. Une centaine en seraient mortes ». affirme-t-il.
« Mon frère est mort à 30 ans. La justice a prouvé que dans ses os il y avait du thorium ! Ils ont exhumé 18 corps et sur 12 d’entre eux ils ont trouvé ces matériels de missiles », soutient pour sa part Lucas Mellis, éleveur dans la zone.
Quirra : une contamination globale ?
Des mesures ont été réalisées dans la zone. Les dépassements des concentrations limites en arsenic, cobalt, cuivre, antimoine et titanium y sont répandus. Et de nombreux animaux mal formés y ont été analysés. Des nanoparticules ont été retrouvées dans le système lymphatique d’un animal qui venait de naître. La chaîne alimentaire entière y est touchée.
Pourtant, ni les militaires, ni les autorités sanitaires locales, ni le gouvernement italien n’ont jugé bon d’avertir la population des risques encourus. Et pour cause : l’emplacement serait loué jusqu’à 1,2 million d’euros par jour. Quelques malades en échange de cette manne financière ne doit pas leur sembler cher payé !
Depuis le lancement de l’enquête, pas moins de huit généraux, des chercheurs, la société chargée du contrôle sanitaire du site, un maire et le médecin de la base militaire ont été envoyés devant la justice. De son côté, et malgré les preuves accablantes, le ministère de la Défense décline toute responsabilité dans cette affaire.
Le Polygone pourrait être déplacé dans le nord de l’Ile… Mais cela constitue-t-il une vraie solution ou est-ce que cela ne servira qu’à déplacer le problème ? Quirra n’est pas le seul Polygone de Sardaigne. Plusieurs autres territoires y sont loués pour des installations militaires, pour un total de 35.000 hectares.
C’est du plutonium et de l’uranium enrichi !