La COP29 s’est achevée à Bakou en Azerbaïdjan dimanche 24 novembre. Les pays développés se sont engagés à financer les pays en développement à hauteur de 300 milliards de dollars par an à partir de 2035. Un accord « insultant » pour les pays en développement qui en demandaient plus de 1.000 milliards.
À Copenhague en 2009, les pays développés se sont engagés à fournir 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 aux pays en développement afin d’atténuer et s’adapter au changement climatique et favoriser les technologies bas carbone. La COP29 devait définir un nouvel objectif de financement climatique (New Collective Quantified GoaL, NCQG). Il remplacera l’objectif des 100 milliards à partir de 2025.
L’accord obtenu à la fin de la COP29 prévoit de monter l’aider globale des pays riches à 300 milliards de dollars à l’horizon 2035. C’est la douche froide pour les pays du sud. Le Secrétaire exécutif des Nations Unies pour le changement climatique, Simon Stiell, a reconnu qu’aucun pays n’a obtenu tout ce qu’il voulait et que le monde quitte Bakou avec une montagne de travail à accomplir. Si certaines délégations ont applaudi l’accord, d’autres, en particulier celles des pays en développement, ont exprimé leur profonde déception face à un objectif de financement « insultant », reconnaît l’organisation des nations unies (ONU), dans un communiqué.
Un accord jugé « trop faible, trop tardif et trop ambigu »
L’accord propose un objectif de financement pour les pays développés à 300 milliards de dollars par an d’ici 2035 à destination des pays en développement « au titre de l’action climatique ». Ce montant proviendra d’une « grande variété de sources, publiques et privées, bilatérales et multilatérales, y compris des sources alternatives ». Des financements innovants qui pourraient aller se chercher dans des taxes à destination des milliardaires, des entreprises pétrolières, certains secteurs comme le maritime ou l’aérien, ou une taxe sur les tractions financières. Par ailleurs, le texte invite les pays en développement à apporter des contributions supplémentaires, notamment par le biais de la coopération Sud-Sud.
Le président du groupe africain, Ali Mohamed déplore un chiffre « trop faible, trop tardif et trop ambigu ». Il rappelle que le récent rapport sur l’écart d’adaptation à lui seul indique que les besoins d’adaptation s’élèvent à 400 milliards de dollars. Tina Stege, Envoyée des Îles Marshall pour le climat veut néanmoins rester optimiste. « Nous partons avec une petite partie du financement dont les pays vulnérables au changement climatique ont un besoin urgent. Ce n’est pas suffisant, mais c’est un début, et nous avons clairement indiqué que ces fonds doivent être accordés avec moins d’obstacles pour atteindre ceux qui en ont le plus besoin. »
1300 milliards de dollars, mais…
Au niveau mondial, le texte « appelle tous les acteurs à travailler ensemble pour permettre l’augmentation du financement des pays en développement Parties à la Convention pour l’action climatique, provenant de toutes les sources publiques et privées, à au moins 1.300 milliards de dollars par an d’ici 2035″.
Le texte reprend ici le montant demandé par le plus grand bloc de négociation : le G77 + la Chine. Problème : ce bloc demande 1.300 milliards de dollars par an d’ici 2030, financé en majorité par les pays développés, et réclame davantage de subventions que des prêts. Et ce pour éviter d’aggraver la crise de la dette des pays du sud. Car selon l’OCDE, « les prêts continuent de représenter l’essentiel du financement climatique d’origine publique ».
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Le groupe d’experts indépendants sur la finance climat (IHLEG) piloté par l’économiste Nicholas Stern proposait pour sa part au moins 1.000 milliards de dollars par d’ici 2030 pour les pays émergents et en développement, à l’exclusion de la Chine, dont 50 % viendrait du secteur privé. Et ce pour impliquer à la fois davantage les fonds publics, mais aussi les entreprises. Les chiffres de l’OCDE montrent que sur les 115,9 milliards de dollars mobilisés par les pays développés pour financer l’action climatique des pays en développement, 80% proviennent de sources constituées de fonds de sources publiques, bilatérales et multilatérales confondues.
Les ONG espéraient au moins 1.000 milliards de dollars en subventions
Côté ONG, la COP29 est un échec. « Ne soyons pas dupes : si la somme d’au moins 300 milliards peut paraître impressionnante, elle est en réalité très décevante. Dans les faits, c’est une petite augmentation par rapport aux 100 milliards eu égard à l’inflation et aux catastrophes climatiques qui ne cessent de s’enchaîner », réagit Gaïa Febvre, responsable politiques internationales au Réseau Action Climat. Et pour cause, les catastrophes naturelles ont causé en 2023 des dégâts chiffrés à environ 280 milliards de dollars (267 milliards d’euros), selon les estimations publiées par le groupe de réassurance Swiss Re.
Le Réseau Action Climat espérait aller beaucoup plus loin et évoque « une trahison pour les populations vulnérables et les générations futures ». « Au niveau de notre réseau international [Climate Action Network, CAN] d’environ 2.000 ONG, on prône un chiffre de 1.000 milliards de dollars en subventions, hors finance privée, partage Gaïa Febvre, responsable politiques internationales au Réseau Action Climat. On défend aussi des sous-objectifs : 30 % pour l’atténuation, 30% pour l’adaptation et 40 % pour les pertes et dommages ».
Si l’accord ne satisfait pas grand monde, les dirigeants du G20 et les pays vulnérables ont réaffirmé leur engagement en faveur du multilatéralisme. Une victoire à souligner, face aux turbulences géopolitiques provoquées par les conflits et la réélection de Donald Trump. Et ce, face aux tentatives des économies axées sur les énergies fossiles comme l’Arabie saoudite pour briser la coalition mondiale en faveur de l’action climatique. Un nouveau groupe de dirigeants composé du Kenya, de la Colombie, de l’UE, des pays les moins avancés et des États insulaires a émergé et a ainsi contribué à négocier cet accord. Le test décisif pour l’élimination progressive des combustibles fossiles sera désormais de savoir si les plans climatiques nationaux, qui doivent être présentés d’ici février, montrent clairement les voies à suivre pour réduire la consommation de charbon, de pétrole et de gaz.