Dans les jardins de la Maison Blanche, Donald Trump a annoncé ce 1er juin le retrait des Etats-Unis de l’Accord de Paris sur le climat. Face à un tollé mondial, quelles suites donner à l’Accord de Paris?
Lors de son discours, Donald Trump a tout d’abord tenu à vanter sa politique économique. Selon lui, elle a permis de réels progrès économiques et ramené la croissance depuis son élection. Sa détermination serait sans faille pour le peuple américain et il veut surmonter « tout obstacle contre ces progrès ».
Sortir de l’Accord de Paris pour pérenniser la croissance
Après moults hésitations, le Président américain a finalement décidé de sortir de l’Accord de Paris, comme il l’avait promis durant sa campagne électorale. Non seulement, il retire son pays de l’Accord « dès aujourd’hui », mais il se désengage aussi de tous les accords financiers qui soutiennent l’Accord. Les Etats-Unis s’étaient engagé à réduire de 26 % à 28 % leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2025.
La mauvaise foi, la démagogie et le nationalisme sont au rendez-vous pour justifier sa décision. Il qualifie l’accord de « très injuste » et estime qu’il « s’est fait sur le dos des travailleurs américains ». Avec des calculs hasardeux, il projette que l’accord « nous faire perdre 2,7 millions d’emplois d’ici 2075 ». Il oublie certainement de prendre en compte les emplois qui pourraient être créés par la transition écologique, écologique et la croissance verte.
D’ores et déjà, plusieurs dizaines de villes et d’Etats américains ont promis qu’ils développeraient l’économie verte au niveau local. Plusieurs grands patrons américains ont également dénoncé cette sortie, notamment Elon Musk, PDG de Tesla et de SpaceX.
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L’Accord de Paris serait mauvais pour l’environnement
Donald Trump se pose en défenseur de l’environnement. Il quitte l’accord car « non seulement l’accord de Paris soumet nos concitoyens à une pression économique sévère mais en plus n’est pas bénéfique à l’environnement ». Le président américain voudrait continuer à faire des Etats-Unis « le pays le plus propre, sans perdre d’emploi ». Il fait semblant d’oublier que les Etats-Unis sont le deuxième émetteur mondial de GES. Avec 4% de la population mondiale, les Etats-Unis émettent 17,89% des GES mondiaux.
Il y a mieux. L’accord n’aurait pas d’impact sur les plus gros pollueurs. Il rappelle que la Chine s’est engagée sur un plafonnement de ses émissions, au plus tard en 2030, sans chiffrer la hauteur de ce pic. L’accord aurait donc été conclu pour avantager économiquement leurs concurrents, notamment la Chine et l’Inde, qui recevront des milliards de dollars, alors même que leurs engagements seraient faibles.
Si la Chine est bien devenue le premier pays émetteur de GES avec 20,09% des émissions mondiales, elle compte 18% de la population mondiale. Par tête, les Chinois émettent donc beaucoup moins de GES. Et si l’on prend en compte les émissions cumulées, les Etats-Unis restent de loin le pire émetteur historique.
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Trump veut renégocier l’Accord de Paris!
L’Accord de Paris a été négocié après de longues années de discussion, suite à l’échec de Copenhague en 2009. Mais Donald Trump annonce vouloit négocier un nouvel accord ou renégocier l’accord existant. Un accord qui serait « juste pour les Etats-Unis, leurs entreprises, leurs salariés, leur population, leurs contribuables ». Hors de question lui ont répondu dans un communiqué conjoint la France, l’Allemagne et l’Italie. « Nous ne renégocierons pas un accord moins ambitieux », lui a répondu dans la soirée Emmanuel Macron. Il a repris à son compte la célèbre formule de l’ex-secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon en rappelant « Il n’y a pas de plan B car il n’y a pas de planète B ».
Puis le Président français a précisé que la France se devait d’être dès aujourd’hui plus ambitieuse dans la lutte contre le changement climatique. Il a appelé « tous les scientifiques, ingénieurs, entrepreneurs et citoyens engagé s» à venir travailler en France sur des solutions contrètes pour le climat. Avant d’annoncer un plan un plan d’actions concret et des initiatives dans les prochains jours pour accroître l’attractivité pour les chercheurs et les entreprises de la transition écologique.
Quelles suites donner à l’Accord de Paris?
À ce jour, 147 pays, représentant 83,59% des émissions mondiales de gaz à effet de serre ont ratifié l’Accord de Paris. La Russie et la Turquie manquent notamment toujours à l’appel. Avec le retrait des Etats-Unis, ce sont 17,89% des émissions qui sortent de l’accord. Le solde est donc désormais à 65,7% des émissions mondiales. Affaibli, l’accord reste toujours plus puissant que Kyoto II. Ce dernier ne représentait au maximum que 15% des émissions mondiales de GES.
Pour se retirer de l’Accord de Paris, un pays doit notifier son intention au secrétariat de la Convention climat de l’ONU (CCNUCC). Cette disposition est prévue dans l’article 28 de l’accord. Il peut néanmoins le faire que trois ans après l’entrée en vigueur du texte, effective depuis le 4 novembre 2016. Il y a ensuite un préavis d’un an avant de réellement sortir de l’accord. Les Etats-Unis sortiront donc officiellement le 4 novembre 2020. À moins qu’ils se retirent totalement de la Convention climat de l’Onu. Il ne leur faudrait alors qu’un an après la notification. Cette option ne semble en revanche pas être la piste privilégiée par les Américains. Dans les faits, l’Accord n’étant pas juridiquement contraignant, rien n’empêche les Etats-Unis, tout simplement, de ne pas respecter leurs engagements d’ici là.
Un accord fragile et des objectifs difficiles à atteindre
Les contributions actuelles sont insuffisantes pour atteindre l’objectif des 2°C, voire des 1,5°C en 2100. Pour le moment, la trajectoire dessinée mène la planète vers une hausse de plus de 3°C d’ici 2100. Sans les Etats-Unis, l’ensemble des pays qui ont ratifié l’accord vont devoir redoubler d’efforts pour limiter le réchauffement climatique à 2°C, voire 1,5°C en 2100. Cela semble malheureusement impossible. Il reste de nombreuses règles à définir. Il s’agit notamment des mécanismes pour la révision des contributions et la transparence des politiques climatiques des pays.
Par ailleurs, les pays émergents ont signé l’Accord en échange d’un financement de 100 milliards de dollars par an dès 2020. En l’absence des Etats-Unis, le problème le plus dur à surmonter sera certainement celui du financement. Et avec cette annonce, la Convention climat de l’ONU se voit amputée de 23% de son financement. La Chine et Union européenne devraient désormais prendre la tête du combat climatique.
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com