Dans son enquête Fraude alimentaire : un crime organisé ?, Bénédicte Delfaut montre comment les criminels organisent le crime autour de la fraude alimentaire. Cela souligne l’importance de développer les moyens des systèmes de contrôle et des laboratoires d’analyses pour débusquer les contaminants, OGM et microorganismes.
Les analyses agroalimentaires ne mentent pas : toute notre alimentation peut être falsifiée. L’année dernière, foodwatch publiait son livre-enquête « Manger du faux pour de vrai – Les scandales de la fraude alimentaire« . Le nouveau documentaire de Bénédicte Delfaut « Fraude alimentaire : un crime organisé ? » en rajoute une couche.
Une large fraude qui rapporte
Huile d’olive, poisson, viande, épices, aucun rayon n’échappe au colossal trafic de la fraude alimentaire. Celui-ci rapporterait en Europe 30 milliards d’euros à cette nouvelle mafia. Son modus operandi ? Substituer un ingrédient par un autre moins cher. Ainsi, une commande publique de 1500 tonnes de steaks-hachés importés de Pologne en 2019 se retrouvait au cœur de la controverse. Destinée aux associations caritatives, leur couleur blanchâtre a intrigué. Et pour cause : ils contenaient des déchets d’abattoirs à la place de la viande. « On trouve du tissu osseux, du tissu conjonctif, des glandes, des muqueuses, des tissus lymphoïdes : sous-produits et déchets d’abattoirs », énumère un expert.
« De ce phénomène, nous ne voyons que des manifestations sporadiques, lorsque des scandales alimentaires de grande ampleur éclatent : porc dans des produits halal, œufs contaminés au fipronil, déplore Bénédicte Delfaut. Une vision qui, par définition, ne peut être que parcellaire et biaisée. »
Une fraude alimentaire difficile à analyser
Les enquêteurs et les fonctionnaires de la répression des fraudes traquent tant bien que mal les produits suspects grâce aux analyses chimiques. En Hollande, le documentaire présente la fausse viande bovine. En Espagne, il pointe un trafic de chair de thon périmée piquée et recolorée avec des produits toxiques. Et en Italie, les fraudeurs sont légion, la fraude concerne toute sa gastronomie.
Le trafic est juteux et échappe encore trop souvent aux contrôles. « Depuis que la nourriture s’est éloignée de nous, dans cet espace qui s’est créé, fait d’intermédiaires, de sous-traitants, de traders, la fraude alimentaire a explosé. Les fraudeurs cassent les prix, des acheteurs ferment les yeux », résume Bénédicte Delfaut.
Le système de contrôle déjà défaillant s’applique par un nombre d’agents de plus en plus réduit. Fin 2020, des analyses sur du sésame importé d’Inde détectaient la présence d’oxyde d’éthylène. Cette substance chimique cancérigène s’y retrouvait à un taux 605 fois supérieur à la norme. Ces graines ont pourtant été utilisées dans plus d’une dizaine de milliers de produits diffusés dans toute l’Europe. Si l’alerte a bien été lancée et affichée dans la plupart des magasins, est-elle arrivée à temps ? Lorsque les produits sont retirés du marché, il est déjà trop tard. Des millions de personnes les ont déjà acheté, peut-être déjà consommé. Mais surtout, combien de personnes ne vérifient jamais les appels de retours de produits à l’entrée des magasins?