Selon le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (CITEPA), l’évolution des émissions françaises correspond à la trajectoire prévue par la Stratégie nationale bas-carbone. Pourtant, certains secteurs comme l’industrie ne respectent pas les objectifs fixés. Le Réseau Action Climat attend plus d’efforts de la part du Gouvernement pour une réduction d’émissions de CO2 plus rapide.
Est-on sur la bonne voie au niveau énergétique ? Dans un communiqué en date de ce mardi 14 juin, le gouvernement se félicite : « La France atteint ses objectifs » en termes d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Cette annonce fait suite à la publication des estimations du centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (CITEPA).
Ces estimations indiquent que les émissions françaises atteignent 418 Mt CO2 hors secteur des terres et forêts, en 2021. Elles semblent suivre la trajectoire prévue par la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), la feuille de route de décarbonation du gouvernement. « Par rapport à l’année 2019 (avant le confinement), les émissions de 2021 sont en baisse de 3,8 % (soit -16 Mt CO2e, hors secteur des terres et des forêts) », rappelle le Gouvernement.
« Au maximum on était censés émettre 422 millions de tonnes et on est cette année à 418 en émissions sectorielles, rappelle Zélie Victor, responsable transition énergétique au Réseau Action Climat. La France respecte son quota d’émissions cette année, qui a été marquée par un contexte assez contraint avec les restrictions sanitaires' ».
Un rebond d’émissions entre 2020 et 2021
Mais ces résultats ne permettent pas d’affirmer si tôt l’atteinte des objectifs. La SNBC, dans sa seconde version, vise une baisse des GES de 40% d’ici 2030 par rapport à 1990. Et elle ambitionne de parvenir à la neutralité carbone d’ici 2050. La France atteint -23% en 2021, selon les derniers chiffres du Citepa.
« On observe déjà un rebond entre 2020 et 2021 dans tous les secteurs », indique Zélie Victor en consultant les chiffres. Mais certains secteurs, comme l’industrie, ne respectent pas les objectifs fixés. Pour ce dernier, la SNBC prévoit une baisse de 35% par rapport à 2015, pour atteindre 56 millions de tonnes. L’industrie émet encore aujourd’hui plus de 77 millions de tonne. Ce secteur reste alors un « point de vigilance » pour le Réseau Action climat.
Le Réseau Action Climat demande plus d’efforts pour atteindre les objectifs fixés
La France ne respecte pas non plus ses objectifs en ce qui concerne les émissions nettes du secteur des terres et des forêts. « Si on les intègre, l’objectif n’est plus atteint », constate la responsable transition énergétique. Au lieu d’arriver à une baisse de -39% pour ce secteur, la réduction ne s’élève qu’à -13,8%. « C’est un secteur sur lequel on va devoir compter pour la compensation carbone. Pour atteindre la neutralité carbone, il faudra compenser les émissions résiduelles qu’on n’aura pas réussi à résorber », explique Zélie Victor.
Selon la responsable du Réseau Action Climat, la France reste encore sur « le fil de ses objectifs », et devra déployer encore « plus d’efforts » pour relever les ambitions annoncées par la SNBC, mais également par le plan climat européen. Dans le cadre de son renforcement, la réduction des émissions françaises doit encore augmenter d’au moins -55% d’ici 2030 par rapport au début des années 1990.
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Un rythme de réduction « pas assez rapide »
Les différents graphiques de la CITEPA concluent une baisse tendancielle depuis les années 2000. « Mais la question qui se pose reste celle de sa vitesse, et pour l’instant elle n’est pas assez rapide », prévient Zélie Victor. Selon la responsable transition énergétique, les années pré-covid n’affichent pas un rythme de réductions d’émissions suffisantes. « Le Haut Conseil pour le Climat recommandait d’atteindre minimum 3% de réduction par an à partir de 2021. Si on fait la moyenne sur une décennie, nous en étions à 1,5% », compare-t-elle.
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Selon le Réseau Action Climat, la transition écologique s’accompagne « sur le temps long », plutôt que sur un « arrêt brusque des activités » comme en temps de pandémie. En 2020, les émissions s’élevaient à 393 méga tonnes de CO2, soit une baisse de 41,6% en un an. Et depuis 2017, la baisse atteint au total 9,6 %. L’association demande alors au Gouvernement de confirmer cette baisse tendancielle, qui ne serait pas « juste à cause d’évènements restreints ».
Dès la reprise des activités, le secteur de l’aérien est par exemple revenu à un niveau démissions de « 80% par rapport à la période pré-covid », alors qu’il faut « au contraire réduire encore davantage » selon Zélie Victor. Le transport étant l’un des secteurs les plus polluants pour la planète, avec un taux total de 30% en 2021. S’en suit l’agriculture (19%), l’industrie manufacturière (19%) et l’industrie de l’énergie (18%).
Un loi dès cet été pour les énergies renouvelables
Le déploiement des énergies renouvelables, notamment éolien et solaire, est encore trop lent pour atteindre les objectifs annoncés. À l’occasion de la parution des résultats de la CITEPA, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a annoncé sur Twitter la présentation d’une loi d’urgence dès cet été. Celle-ci donnerait « un nouveau coup d’accélérateur au déploiement des énergies renouvelables ».
« Les efforts devront s’accélérer dans les années à venir afin de doubler le rythme de baisse des émissions de gaz à effet de serre dans les cinq prochaines années », a annoncé le Gouvernement dans son communiqué. En plus de cette accélération, nécessaire selon le rapport du Giec, le ministère compte également sur davantage de « sobriété énergétique » et la relance du nucléaire pour atteindre les objectifs fixés par la SNBC et le plan climat européen.