Le gouvernement ne reviendra pas sur l’interdiction de la fracturation hydraulique pour l’exploitation des gisements de gaz de schiste a annoncé la ministre de l’Ecologie Delphine Batho maisle gouvernement n’a pas fermé la porte aux forages d’exploration. Retour sur une technique hautement controversée en Europe et dans le reste du monde.
« Le gouvernement maintient clairement et nettement sur l’interdiction de l’exploitation des gaz de schiste, car nulle part dans le monde il n’a été prouvé que cette exploitation pouvait se faire sans dégâts considérables sur l’environnement et avec des risques importants pour la santé », a affirmé la ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie Delphine Batho le 19 juillet sur BFMTV.
Recevant plusieurs ONG le 24 juillet, le premier ministre Jean-Marc Ayrault n’a pas cependant pas fermé la porte à l’exploration des gaz de schiste. Simplement, il a indiqué que ce serait l’un des sujets débattus lors de la conférence environnementale du 14-15 septembre. Mme Batho a quant à elle annoncé que si une nouvelle technique était mise au point, « nous aurions un vrai débat démocratique ».
En attendant la réforme du code minier, texte qui fixe les règles sur l’exploitation des énergies dans les sols, les industriels demandent régulièrement que des forages d’exploration soient au moins effectués pour s’assurer que la ressource existe bien. La loi du 13 juillet 2011 qui interdit l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique en France, permet effectivement d’utiliser cette technique dans le cadre de projets scientifiques d’expérimentation (voir la carte de France des autorisations de prospection)
Des impacts environnementaux majeurs
L’extraction du gaz de schiste se heurte à une résistance citoyenne continue en France, en raison de préoccupations environnementales concernant la technique de fracturation hydraulique. Cette technique consiste à injecter à plus de 3000 m de profondeur et à très forte pression un mélange d’eau, de sédiments et de produits chimiques pour briser la roche et libérer les molécules de gaz naturel piégées dans les roches sédimentaires argileuses. L’extraction de gaz de schiste nécessite ainsi d’énormes quantités d’eau mélangées à des produits chimiques.
La technique de fracturation hydraulique peut contaminer des eaux souterraines en raison de l’élimination inadéquate des produits chimiques et de l’eau utilisée. Cette contamination entraîne alors inévitablement celle de l’eau potable et des eaux de surface. L’utilisation d’énormes quantités d’eau a également été citée comme une cause d’érosion et de dommages aux paysages naturels.
La fracturation hydraulique provoquerait également des perturbations sismiques selon deux études distinctes. Une étude du U.S. Geological Survey note effectivement une augmentation remarquable des tremblements de terre dans la zone centrale des États-Unis depuis 2001. Selon cette étude, l’augmentation en question est certainement la conséquence de l’exploitation des gisements de gaz et pétrole de schiste. Selon un rapport britannique, il est aussi hautement probable que des tests de forages de gaz de schiste aient déclenché des secousses sismiques dans le Lancashire, en Angleterre : l’un d’une magnitude de 2,3, qui s’est produit le 1er avril 2011 et l’autre, datant du 27 mai 2011, d’une magnitude de 1,5.
Toutefois, selon un rapport spécial du Conseil national de la recherche Américain, la technique ne pose pas de risques de déclencher des tremblements de terre suffisamment puissants pour être ressentis. Il note qu’aucun mort n’a été répertorié et qu’aucun dommage sérieux n’a été causé par des séismes d’origine humaine aux États-Unis. Le rapport note toutefois que les techniques visant à récupérer le dioxyde de carbone provenant des centrales au charbon et à le stocker sous terre, sont nettement plus dangereuses du point de vue sismique en raison de la quantité de gaz qui devrait être enterrée. Il invite à poursuivre les études sur le sujet.
Selon les évaluations actuelles, l’Europe détiendrait des réserves de gaz de schiste de l’ordre de 73 Tm3 cubes, soit environ un dixième des réserves mondiales (666 Tm3). Les réserves mondiales de gaz de schiste représenteraient plus de 4 fois les réserves de gaz conventionnels. La France détiendrait les deuxièmes plus importantes ressources récupérables en Europe, avec 29% des ressources européennes grâce à ses nombreux bassins sédimentaires (bassin parisien, bassin du sud-est, bassin d’Aquitaine,..). Face à la montée du prix du gaz et du pétrole, l’Europe et la France arriveront-ils réellement à faire passer l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique avant l’intérêt financier ? Le ton devrait rapidement être donné.
Auteur : Matthieu Combe, fondateur du webzine Natura-sciences.com
L’actualité tombe plutôt bien ce mois-ci : tous ceux qui veulent se faire une opinion éclairée et dépassionnée sur le sujet des gaz de schiste peuvent se reporter au dernier numéro de Science et pseudo-sciences, de l’association française pour l’information scientifique (Afis) : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1903
Il vient de paraître et est disponible chez tous les bons marchands de journaux. Avec en plus un dossier sur un autre sujet qui fâche : les nanotechnologies. 😉
je prie le ciel pour que cette idée soit enterrée. tout simplement.