Au cours du 36ème sommet de l’Union africaine, les dirigeants présents ont évoqué plusieurs enjeux de développement du continent. Parmi eux : la mise en place d’une zone de libre-échange à l’échelle continentale ou encore l’accès à l’énergie. C’est dans ce contexte que le président malgache Andry Rajoelina a formulé le souhait d’atteindre l’indépendance énergétique sur l’île.

Les défis auxquels l’Afrique devra faire face durant les prochaines années sont nombreux. Le 36ème sommet de l’Union africaine (UA) a réuni plus de 30 dirigeants du 15 au 19 février dernier à Addis-Abeba, capitale de l’Éthiopie. En toile de fond, les tensions entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, ainsi que les deux coups d’État qui ont secoué le Burkina Faso étaient présents dans les esprits.
Mais au-delà de ces difficultés, la préoccupation première de la rencontre était d’accélérer la mise en place de la zone de libre-échange intra-africaine. De plus, les dirigeants et responsables de la Commission de l’UA, les ministres d’État membres de l’UA et les responsables des organes et bureaux de l’UA présents avaient à cœur de débattre de sujets d’intérêt pour le continent et ses peuples.
La France produit plus d’électricité que l’Afrique
C’est pourquoi, dans un contexte de crise mondiale, l’énergie était également au cœur des discussions de ce dernier sommet de l’UA. L’accès à l’énergie demeure encore à l’heure actuelle une problématique majeure en Afrique. Et pour cause, 600 millions d’individus, soit 43% de la population du continent, manquent d’électricité en Afrique, la plupart d’entre eux en Afrique subsaharienne. Selon la Banque mondiale, l’accès à l’énergie dégringole même à 8% dans les zones rurales d’Afrique de l’Ouest.
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Selon l’AIE en 2020, la capacité de production d’électricité en Afrique s’élevait à environ 100 gigawatts (GW) entre 2011 Or, la puissance installée du mix électrique français est de près de 140 GW.
Seul un tiers des Malgaches ont accès à l’électricité
Pourtant, l’Afrique possède diverses ressources pouvant être transformées en énergie. Mais plusieurs causes impactent négativement l’accès à l’énergie pour les populations. À l’occasion du 4ème forum international sur les perspectives africaines, l’OCDE et la Banque africaine de développement indiquaient que trois quarts des ressources fossiles du continent sont destinées à l’export. En cause : des manques de moyens financiers et d’infrastructures de transformation locales.
De plus, la vétusté de certaines installations provoque des pertes de matières premières, en particulier de gaz. Selon l’Agence internationale de l’énergie, l’Afrique aurait besoin de 190 milliards de dollars d’investissements par an entre 2026 et 2030 pour atteindre ses objectifs en matière de climat et d’énergie.
Toutefois, la précarité énergétique n’est pas la même dans tout le continent. Pour le comprendre, prenons le cas de l’électricité. Si certains pays en disposent dans l’ensemble de leur territoire à l’instar de la Tunisie, des Seychelles ou de l’Égypte, d’autres accusent des retards certains. C’est notamment le cas de Madagascar. En effet, la Banque mondiale rapporte qu’en 2020, seuls 33,7% des Malgaches avaient accès à l’électricité. Cela en fait le douzième pays au monde où l’accès à l’électricité est le plus faible. De son côté, la Commission européenne ajoute que la couverture en électricité du pays se situait cette année-là entre 15 et 17%. Dans les zones rurales malgaches, l’accès s’effondre aux alentours de 5%.

Atteindre 7.900 Gwh en 2030
C’est dans ce contexte que le président de la République malgache Andry Rajoelina a rappelé l’importance pour son pays d’améliorer l’accès à l’électricité sur le territoire, jusqu’à atteindre l’indépendance énergétique. Selon lui, l’accès à l’électricité est un défi majeur qui attend Madagascar, mais également l’ensemble de l’Afrique. Le président y voit une condition indispensable de l’émergence du continent et du bien-être de ses populations.
Lors d’une table ronde sur la sécurisation de l’accès universel à l’énergie en Afrique organisée par l’Union des Comores, la Commission de l’UA et la Banque Mondiale, Andry Rajoelina a rappelé qu’à l’heure actuelle, la production d’électricité demeure insuffisante. Madagascar ne produit annuellement que 500 à 600 MW d’électricité, ce qui est insuffisant pour alimenter 26 millions d’habitants. En 2018, le ministre de l’Énergie et des hydrocarbures Lantoniaina Rasoloelison fixait l’objectif d’atteindre une production de 7.900 GWh d’ici 2030.
Miser sur les ressources hydrauliques, solaires et éoliennes
Fort de ce constat, Andry Rajoelina, le chef de l’État, s’est voulu force de proposition. Il a notamment incité les dirigeants à accélérer sur l’exploitation des ressources hydrauliques, solaires et éoliennes. « Il faut réduire la dépendance aux énergies fossiles et favoriser les autres sources d’énergies qui sont moins chères, telles que les barrages hydroélectriques », a-t-il indiqué.
Selon lui ce besoin est d’autant plus prégnant que les tarifs de l’électricité en Afrique, indexés sur ceux du pétrole, engendrent un fort alourdissement des factures. Dans certains pays, les ménages sont contraints d’allouer 30% de leurs revenus à l’énergie. Cela pousse même les personnes les plus démunies à renoncer à se raccorder au réseau lorsque cela est possible. C’est notamment pour cette raison que le président malgache veut miser sur les énergies renouvelables. Ce dernier a rappelé sur Twitter souhaiter miser sur les « ressources hydrauliques, solaires et éoliennes » pour fournir de l’électricité à l’ensemble de ses concitoyens.
Madagascar mise sur le solaire
Ainsi, Andry Rajoelina a par exemple décidé d’accélérer le développement du solaire à Madagascar. Dès 2023, 36 villes disposeront de parcs photovoltaïques dotés chacun d’une puissance de 50 MW. « Et dans les années à venir sur les 119 districts, 100% des 119 districts du pays seront électrifiés à travers les parcs solaires », a-t-il précisé.
Andry Rajoelina a aussi fait part de son programme de distribution de kits solaires auprès de 2 millions de foyers. Mis en place en partenariat avec la Banque mondiale, ce projet devrait être réalisé dès cette année. Grâce à soutien de l’institution financière internationale, le président malgache compte également doubler la production en hydroélectrique pour atteindre les 1.000 MW en 2028. « Nous voulons être un des pays modèles sur le continent africain », a insisté le président durant son allocution.
La représentante de la Banque mondiale à Madagascar Marie-Chantal Uwanyiligira a, quant à elle, indiqué sur Twitter que son institution va « contribuer à valoriser les ressources du pays » et faire passer le taux d’accès à l’électricité à 66% d’ici 2030. Pour cela, la Banque mondiale alloue à Madagascar 400 millions de dollars. Ces fonds proviennent de l’initiative Electrifying Africa, au titre du projet Digital and Energy Connectivity for Inclusion in Madagascar (DECIM).